On ne va pas se mentir, The Scribbler est malheureusement un film raté, essentiellement de par son trop maigre budget et par la faute de quelques choix artistiques hasardeux. Adaptation du roman graphique éponyme élaboré par Dan Schaffer, le long-métrage n'en reste pas moins l'un des plus pertinents que j'aie pu voir jusqu'ici qui aborde le thème de la symbiose pathologique. Un peu le même sujet qu'a voulu prendre à bras le corps Zack Snyder en son temps avec Sucker Punch, mais dotées ici de références bien plus profondes que n'aurait certainement pas renié Harold Searles, audacieux psychanalyste spécialisé dans les psychoses symbiotiques, les différentes schizophrénies et les personnalités frontières. Ces thèmes, The Scribbler les analyse sous forme de métaphores à la manière de la saga X-Men. Sauf que la dépense allouée ici n'est pas vraiment la même pour conter les mésaventures de Suki.
Traitée pour soigner son dédoublement de personnalités violemment destructeur, Suki intègre la Tour Juniper où réside une variété de malades mentaux. Avec son taux record de suicides, la dangerosité du lieu sordide ne prête guère aux guérisons, aussi expérimentales soient-elles. Bientôt suspectée de meurtres dissimulés sous forme d'autolyses, Suki va devoir entrer en symbiose avec ses différentes personnalités pour se découvrir et s'exposer à la réalité…
En citant indirectement les écrits de Margaret Mahler, éminente psychiatre américaine, Schaffer maîtrise pertinemment son sujet et glisse dans son script des diagnostics parfaitement concordants aux symptômes dont souffrent ses personnages. Sans pour autant nous gaver de laborieuses informations pour démontrer ses connaissances, le scénariste est tout simplement sincère dans sa démarche et c'est certainement cette authenticité qui rend son script si attachant.
Le problème du film vient indéniablement d'ailleurs. D'abord, le choix du réalisateur, John Suits, qui, bien qu'amoureux du comics de Schaffer, n'est pas vraiment en mesure de nous plonger dans une sordidité adéquate et de trouver le moindre rythme dans son déroulement narratif. Le choix de Katie Cassidy dans le premier rôle est également une fâcheuse erreur de casting, la comédienne n'ayant absolument pas les épaules pour incarner une convaincante Suki. Hormis la toujours impeccable Gina Gershon en nymphomane bipolaire, la surprise provient surtout ici de la part de Michelle Trachtenberg qui incarne à merveille la mystérieuse Alice, implacable serial-pousseuse et véritable cauchemar ambulant pour toutes personnes croisant sa terrifiante présence dans les escaliers de la tour. Dans la peau de ce personnage avide de pur sadisme, la jeune comédienne arbore un look aussi esthétique que flippant et reste certainement LA seule et unique raison attractive de découvrir le long-métrage.
Il ne resterait plus qu'à espérer un remake doté d'un budget bien plus raisonnable pour illustrer l'excellent script de Dan Schaffer. Car, avouons-le, il est extrêmement rare qu'un scénario aborde le thème des psychoses symbiotiques avec autant de ferveur et de précision.