Polar australien tout droit sorti des abysses de véritables faits réels, The Stranger détonne par son intelligence et son découpage méditatif sur la noirceur de l’âme. Un deuxième long-métrage plutôt impressionnant pour un réalisateur qui mérite toute notre attention.
La première ligne directrice où le film souhaite nous conduire, c’est l’ambiance avec laquelle nous allons cohabiter. Un judicieux mélange entre Twin Peaks et Blade Runner donne comme résultat une certaine oppression aérienne qui se balade entre routes et montagnes, huis clos et non-dits. L’atmosphère est telle qu’elle s’abreuve de chacune de nos respirations, nous forçant à suivre Mark, l’un des personnages principaux dans une série d’inspirations qui deviendra une sorte de mantra pour un homme qui chasse le mal jusque dans ses poumons.
L’histoire démarre sur une banale rencontre entre deux hommes, Henry et Mark. Aux premiers abords, il ne s’agit que d’un homme, pris sous l’aile du deuxième dans ce qui semble être une chance d’expier tous les pêchés grâce à de petites missions castées sous forme d’honneur entre malfrats. Jour après jour, une confiance s’installe et une amitié (parfois embarrassante) s’engraine dans un scénario fignolé de sorte qu’une multitude de questions soient posées.
Petit à petit, le climat s’embourbe dans les profondeurs de leur relation, entre cauchemars et appréhension pour un Mark qui domine son poulain dans une armure de grand gaillard qui en impose. Pourtant un sac de doutes l’habite jusque dans les recoins du sanctuaire familial, où prudence et intimité sont les maîtres-mots. L’éventualité d’un fiasco sur l’objectif premier de cette camaraderie l’oblige à redoubler d’efforts pour éviter la faille sous l’amas de confiance qu’il a créé, soit le jeu dangereux d’un flic infiltré mais une petite pièce sur le grand échiquier de l’Australie occidentale.
La cigogne
Ce méli-mélo sous forme de poker se dévoile dans un procédé en poupée russe, démantelant un à un les éléments du passé, des débuts au pourquoi d’une rencontre pas si hasardeuse que ça. Henry, petit chiot plein d’insouciance n’est autre que l’accusé principal d’une affaire de disparition d’enfant vieille de huit ans. De là, tout s’éclaire, de l’ombre à la lumière, nos questions trouvent des réponses, et notre pitié antérieure pour un être candide devient source de colère face au mal.
Mark devient instantanément l’élément clé de l’histoire, où son courage et sa retenue sur une fraternité avec l’assassin d’un enfant est à saluer. Dur de constater les conséquences d’une claustration à son propre domicile en présence de son fils, pas plus jeune que le gamin mutilé du rapport ou encore les attouchements scabreux d’Henry après une dure journée de labeur.
Les enjeux sont élevés et malgré l’importante mise en scène, la réussite de la tâche reste incertaine. Au final, jusqu’où peut-on aller pour coffrer le suspect n°1 ?
C’est ce que semble penser Thomas M. Wright qui a de quoi mettre le spectateur dans une position d’incertitudes tant son déroulement se fait crescendo. Et bien que quelques imperfections se glissent ici et là, l’oeuvre est audacieuse et permet au cinéma oserais-je dire de genre, de s’accoupler davantage avec celui du thriller.