Mon intérêt pour The Sword est d'abord né de son statut, réputé pour avoir renouvelé le genre du Wu Xia Pian, bien plus encore que la modeste première tentative de Tsui Hark, Butterfly Murderers. L'histoire de The Sword se révèle, elle, plutôt classique, et ce n'est pas un mal tant elle s'inspire brillamment des tragédies grecques avec le motif du double, symbolisé principalement par l'existence de deux épées antagonistes que deux spécialistes recherchent ardemment et révèlent les dilemmes humains les plus profonds sur la quête de l'amour, du bonheur, de l'accomplissement.
Pour comprendre le statut de The Sword, il faut donc surtout se tourner ailleurs, à savoir du côté du chambara par lequel il fut en effet contaminé à plusieurs niveaux, donnant lieu à une esthétique plus travaillée que jamais avec des cadres précis et tranchants comme un rasoir, une tournure nihiliste qui fait plus précisément penser aux films de Kenji Misumi et tout particulièrement le fiévreux Sabre du mal, et enfin une expérimentation intermittente sur les couleurs à la manière de Suzuki.
Et grâce à un canevas narratif encore une fois classique, The Sword ne ressemble jamais à un fourre-tout mais digère bien toutes ces influences. Sans oublier évidemment, le travail de Ching Siu-tung qui apportait lui aussi sa patte avec des chorégraphies à la fois nerveuses, aériennes, et raffinées, autrement dit investies d'un véritable sens du mouvement, constituant à mes yeux l'un des piliers esthétiques du nouveau cinéma hong-kongais. Bref, The Sword, bien qu'il ne surprendra pas les amateurs du genre outre mesure, faute d'une intrigue certes traitée de manière intéressante, mais encore une fois peu novatrice, demeure une expérience solide et tout à fait recommandable.