Heureusement que j'ai un faible assumé pour les chroniques familiales nippones qui savent prendre leur temps parce que sinon, avouons le sans crainte, ce film n'est pas vraiment fait pour moi...
Au lieu de nous raconter cette famille de façon subtile et délicate, le réalisateur veut nous convaincre qu'elle est un peu décalée, voire farfelue, la preuve, le grand-père à une touche de cheveux qui se redressent derrière la nuque, ce qui est en soit un peu pénible mais que les partis pris de mise en scène rendent parfois à la limite du soutenable.
Toutes les tentatives pour foutre des effets spéciaux lourdingues supposés rendre compte des états d'âme ou de la folie douce des personnages tombent à plat dans un fracas sonore et trébuchant grassement appuyé parfois par une voix off superfétatoire pour réveiller les deux du fond qui dorment qui n'auraient pas bien compris l'image pénible et enclumesque qui vient de nous souiller les yeux.
Heureusement, ces fautes de goût sont finalement peu nombreuses et le reste du film se regarde très agréablement, à se demander pourquoi ils se sont sentis obligés de nous les infliger d'ailleurs... Peut-être que quelqu'un les avait prévenu par avance que j'avais une sainte horreur des tournesols, en particulier quand c'est mélangé à une gamine un peu renfermée, et qu'ils ont donc décidé gratuitement de me gâcher ainsi mon réveil, je n'ai pas d'autre explication.
La succession de saynètes plus ou moins réussies autour de cette petite famille est pour une fois assez bien tenue sur l'ensemble du film, les histoires sont assez bien mêlées, sans ressentir d'affection particulière pour un des personnages, je n'ai détesté ni le grand-père, ni le parents, ni l'oncle, ni le gamin, ni la gamine, c'est déjà un petit miracle en soi.
Bien sûr, à force de vouloir absolument en faire des tonnes, on nous rajoute des moments particulièrement inutiles, comme le danseur peroxydé en combinaison orange sur la plage, mais surtout on sombre trop souvent dans l'appuyé, le redondant : voir le grand-père claquer dix-huit fois sa fenêtre, à un moment, c'est juste pénible, c'est comme les dix minutes sur le gamin qui dit au revoir au bus, à la longue, c'est embarrassant, ça ne rend pas service au film.
D'ailleurs à force de vouloir trop en faire, d'insister sur les tenues extravagantes et les situations improbables, on en arrive à des visions bizarres où les sosies respectifs du motard des Village People et d'Elton John essaient de nous faire croire qu'ils ont un goût prononcé pour la gent féminine (en particulier si elle veut bien se faire faire de gros seins artificiels ou si elle arrête de lui piétiner la figure et les parties génitales à coup de talon aiguille...).
Si au moins le type avait eu confiance dans son sujet, il nous aurait proposé ses petites histoires sans les boursouflures idiotes par-dessus, par exemple, il y a une scène merveilleuse à un moment, l'enregistrement d'une chanson par le papy et Elton devant un tonton désespéré, c'est absolument formidable en soi, rien à changer mais bien sûr, juste nous la montrer pure et brute, ce n'étais pas possible, faut que ça se termine ridiculement et littéralement dans les nuages histoire de tout gâcher encore une fois...
Sinon, les amateurs du Susumu Terajima de Kitano seront content de le retrouver en fantôme de yakusa sanguinolent avec un étron sur la tête, moi je dis que ça fait toujours un peu plaisir...
C'est dommage de voir ce joli film s'auto-détruire tout de même, la photographie est chouette, c'est agréablement filmé, la vie de famille se laisse voir, fallait juste qu'un cinéaste imbu de lui-même veuille à tout prix nous faire bouffer son esthétique sous-poétique de cabaret pour que le film devienne ce qu'il en reste, un objet faussement bizarre, tristement maladroit et un tantinet indigeste.