Il serait difficile de considérer The Tree of Life comme un film car Terrence Malick offre ici un voyage sensoriel et philosophique pur au travers d'un sujet aussi universel qu'impossible à résoudre : le cycle de la vie.
Guidé par la vision d'un film de montage expérimental - à la limite de l'abstrait - dès son ouverture, Malick expose à la fusion de 2 axes et phases de la vie :
- La perte de la vie d'un fils qui, dans le sentiment de douleur profonde qu'il provoque, amène à questionner ce cycle responsable de toute vie donnée et enlevée auquel l'humain est obligé de se soumettre et d'accepter.
- La création de l'univers, intervenant comme un équilibre face à cette douleur, intervenant comme un non-lieu capable d'émouvoir et d'émerveiller dans sa simple suspension temporelle.
C'est dans cette fusion que toute l'esthétique de The Tree of Life prend sens ; créer un jeu d'écart personnifiant l'évolution du cycle de la vie. Avec un cadre à hauteur d'enfant et particulièrement resserré dans le contexte intime de la maison et du jardin familial, la porte est ouverte au grand angle et à la profondeur de champ lorsque les enfants déambulent et jouent dans la rue, dans la nature - signe d'une conscience s'éveillant progressivement et qui voit le monde s'agrandir au fur et à mesure qu'elle le parcourt.
Dans cette découverte du cycle de la vie, Malick accorde également une importance particulière dans le rapport d'opposition entre deux formes d'éducation, formant deux abords différents de l'apprentissage de la vie : doux par la mère, stricte par le père.
Cette opposition en est d'autant plus pertinente car cette dernière permet un véritable développement tragique de ces deux figures parentales afin d'y instaurer des fragilités - voire des blessures - internes extrêmement profondes ; le personnage de Jessica Chastain voit sa position de mère protectrice, de figure d'ange d'amour maternel sans cesse mise à mal face à sa soumission à la figure patriarcal du personnage de Brad Pitt, un père essayant de préparer ses enfants à la violence du monde mais dont les regrets de n'être devenu musicien lui font découvrir peu à peu ses failles.
Ces deux personnages sont absolument superbes tant leur écriture est profonde, particulièrement pour le père où l'influence de sa dureté sera telle, qu'elle conduira son propre fils à lui dire :
I'm as bad as you are.
Des mots qui suivront ce petit garçon et résonneront dans sa tête jusqu'à l'âge adulte où coincé dans les vertigineuses et restreintes architectures modernes, ce dernier semble comme jeté dans un monde dont il ne voulait pas (à l'image de son père).
Si dans son ensemble, le style expérimental de The Tree of Life est grandiose, d'une puissance visuelle désarmante, il reste néanmoins trop insaisissable. Dans sa direction très contemplative, Malick crée un frein évident dans le saisissement du sens de son sujet et laisse longtemps dans l'incompréhension : ce dernier est dans sa bulle et son ode à Dieu et à la vie ne parvient pas à exploiter toute sa richesse.
The Tree of Life reste cependant un film à la beauté sensorielle et narrative incroyable, à la limite de l'indescriptible. Une beauté qui ne s'épuise jamais et qu'il faut voir pour croire.