Encore un biopic ? Décidément Hollywood ne sait plus faire preuve de créativité, sauf qu'avec Robert Zemeckis à la réalisation, le film prend une autre dimension et devient un hymne à la vie et à ses rêves. Cette adaptation de la biographie de Philippe Petit : To Reach the Clouds, démontre que lorsqu'un blockbuster est entre les mains d'un amoureux du 7ème art, il devient plus qu'un simple produit de consommation, en offrant la magie que promet le cinéma depuis ses débuts.
Dans les années 70, Philippe Petit (Joseph Gordon-Levitt) est un jeune funambule. Il rêve de mettre en place son fil entre les deux tours du World Trade Center, qui sont les plus hautes du monde. Pour réaliser cet exploit, il va devoir faire preuve d'ingéniosité pour marquer l'histoire de son art.
"Tout n'est pas si facile, tout ne tient qu'a un fil" comme le disait si bien les poètes de NTM. Toute l'histoire tourne autour de ce fil, de cette envie de réaliser son rêve envers et contre tous. Ce besoin d'aller au bout de soi, avant que cela ne devienne une obsession trop envahissante, au risque de sombrer dans la folie. Mais cette folie, n'est-elle pas déjà en lui ? La ligne est ténue entre la folie et le génie, dommage que ce point ne soit pas plus exploité durant l'histoire. C'est le reproche que je fais au film, de ne pas montrer le côté obscur de l'homme face à ce défi fou. Cela manque de psychologie, de profondeur et pourtant cela fonctionne.
Robert Zemeckis est un réalisateur à part, il aime les défis et fait souvent preuve d'innovation dans ses films. Parfois cela se passe bien et d'autres fois, moins bien. Mais il prend des risques, comme le prouve sa filmographie : Qui veut la peau de Roger Rabbit ? En 1988, grâce à l'énorme succès de Retour vers le futur, il peut s'amuser et se fait plaisir en mélangeant les prises de vues réelles, avec celle de personnages de cartoons. C'est une réussite, Hollywood trouve un successeur à un autre magicien, Steven Spielberg. L’aîné ne s'était pas trompé en lui donnant sa chance au début de sa carrière, les vrais reconnaissent les vrais.
La suite confirme son envie d'expérimenter de nouvelles techniques. Avec Forrest Gump, il redonne vie à des personnages historiques en les intégrant à l'histoire avec des images d'archives. Encore une fois, le succès est au rendez-vous. Dans Le Pôle Express, il va mettre en pratique la motion capture. Cela sera moins convaincant, mais on ne réussit pas tout dans la vie, non ? Le tout, c'est d'essayer, non ? C'est ce que font les génies, inventeurs et rêveurs. C'est pour cette raison que le rêve de Philippe Petit, ne pouvait que devenir un film de Robert Zemeckis, qui va en faire une oeuvre magique en sublimant la 3D.
Un film réalisait en 3D et donc à voir en 3D, sinon on risque de passer à côté, comme pour La bataille de la montagne du tigre de Tsui Hark. Pour une fois, Robert Zemeckis n'innove pas, mais s'approprie la 3D pour la rendre plus vertigineuse. Dans Gravity, elle était déjà magnifique, mais le film se reposait essentiellement sur celle-ci, en n'offrant rien de plus. The Walk va un peu plus loin, certes c'est le visuel qui prédomine avec cette séquence finale époustouflante qui nous colle à notre siège. Mais le personnage interprété par Joseph Gordon-Levitt est touchant, de par son envie de réaliser son rêve, son manque de cynisme et sa bonne bouille, ça aide. Le couple qu'il forme avec Charlotte Le Bon fonctionne bien. Au contraire, les personnages secondaires ne servent vraiment que de faire-valoir. On en revient à cette absence de profondeur psychologique, mais on peut faire avec, tant on est obnubilé par l'exploit à venir.
Il y a de la poésie dans le cinéma de Robert Zemeckis. L'histoire est narrée par Joseph Gordon-Levitt du haut de la statue de la liberté. C'est un conte qui débute en noir et blanc, où se mêle les couleurs dans les rues parisiennes, en évitant le cliché du béret avec la baguette de pain. Puis l'image s’accélère, avant de ralentir. On se retrouve dans un cirque avec Ben Kingsley en mentor, mais aussi un père de substitution. On s'amuse, puis on s'agace à force d'entendre l'excuse foireuse de Joseph Gordon-Levitt pour s'exprimer constamment en anglais. On monte sur le fil avec lui. On vibre avec lui. On s'angoisse avec....là non, car notre héros ne panique presque pas, quand il est sur le fil. C'est son monde, sa zone de confort, peu importe la hauteur, le lieu ou les problèmes, il se sent bien, comme chez lui, loin de tout et pourtant si proche de nous.
L'histoire est construit comme un thriller. Une équipe est formée pour réussir cette mission impossible, pour que le plan se déroule sans accroc. Mais c'est aussi un hommage aux tours du World Trade Center disparues le 11 septembre 2001. Elles n'étaient pas aimés lors de leurs constructions, mais l'exploit de Philippe Petit va leur donner une dimension humaine, avant d'être une fierté pour les new-yorkais, puis.....le dernier plan est émouvant, cela s'appelle la magie du cinéma et elle fonctionne merveilleusement bien, tout au long de cette histoire drôle et émouvante.
On retrouve dans ce film, le même plaisir ressenti devant A la poursuite de demain. Deux œuvres qui n'ont pas trouvé leur public, alors qu'elles permettent de rêver, de s'évader dans des univers ou des périodes loin de notre quotidien. C'est une expérience visuelle à vivre, aussi intense que passionnante.