Des Maîtres Flamands aux clairs-obscurs de Georges de La Tour en passant par les ciels de Constable, chacun trouvera les références picturales que le film de Robert Eggers saura réveiller par son éblouissant travail visuel. Constant jeu de résonances, The witch tord le cou au cinéma horrifique mainstream en revenant aux origines de la peur.


Née des sources de l'irrationnel, évoluant à distance égale du Diable et de Dieu, passant de l'un à l'autre, se réclamant de l'un, armant les préceptes de l'autre, la peur habite l'homme là où il ne trouve pas de réponse. Situé en Nouvelle-Angleterre 62 ans avant le procès de Salem, The witch confronte l'obscurantisme religieux d'une famille loin du monde à la présence tangible d'une sorcière occupant la forêt environnante.


Le film n'est pas tant un conflit de voisinage qu'une lente bataille à mort entre folie et raison. William, Katherine et leurs cinq enfants (dont Thomasin l'aînée et Caleb le cadet), vont rapidement mesurer les limites d'un dogme qui les enferme bien davantage qu'il ne les défend. C'est alors contre eux-mêmes qu'ils se retourneront.


La première partie, lente et presque déceptive, installe les personnages dans le décor, désigne l'évidente ennemie et attend. Quand l'histoire se précipite, tout est en place pour que la peur l'emporte. Subitement anxiogène, The witch déjoue les pronostics et se joue de nous en s'attaquant à ce qui constitue le cœur du récit, la famille : il en détruit les fondements avec violence, inoculant le doute, la terreur et la haine au sein de ce qui devrait se poser en protection ultime.


Dès lors tout peut arriver et tout arrive. L'édifiante dernière scène s'ouvre sur d'autres perspectives et le spectateur se met à rêver de jours meilleurs.


Formellement superbe (travail visuel et sonore), le premier film de Robert Eggers nous vrille les tripes.

pierreAfeu
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le 20 juin 2016

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pierreAfeu

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