The Woodsman
6.9
The Woodsman

Film de Nicole Kassell (2004)

J’avais envie d’un film sombre et plombant. Comme j’ai vu un reportage sur les pédophiles récemment ("Pédophilie, de la pulsion à l’interdit"), The woodsman me semblait être un bon choix.
Après 12 ans d’emprisonnement pour attouchements sur mineures, Walter est remis en liberté. Le film raconte essentiellement sa réhabilitation ; le personnage doit se faire accepter de nouveau par la communauté, par ses proches… et s’accepter soi-même. On sent chez lui une gêne permanente, qu’on peut attribuer aussi bien à un dégoût de soi qu’à une crainte du regard des autres, où qu’il aille. Walter reste fermé, j’imagine parce qu’il ne peut jamais savoir qui est au courant de son passé, et parce qu’il craint qu’une personne à qui il s’attacherait ne découvre son secret.
The woodsman précipite toutefois la confrontation de Walter à ces problèmes, puisqu’au bout de quelques jours seulement une femme couche avec lui. C’est pas très crédible, mais la situation était nécessaire dans le film, pour que Walter ait quelqu’un qui tient à lui, et à qui il se sent obligé de parler de ce qu’il a fait…
Même dans les scènes où il est censé passer du bon temps, Bacon exprime un mal-être profondément ancré, dont il serait impossible pour son personnage de se séparer un jour ; il ne peut que momentanément faire comme si ça n’était pas là, avant que la réalité ne le rattrape.


La sœur de Walter ne lui fait plus confiance, ni la police, dont un officier passe régulièrement le persécuter. Le film inverse les rôles du bon et du méchant, sans non plus insister lourdement, comme c’était le cas dans Des hommes sans loi (premier exemple qui me vient à l’esprit), où le flic était vraiment un archétype de bad guy. Dans The woodsman, les deux personnages sont humains, et on comprend la position de chacun.
Ce qui est étonnant, c’est que le film s’efforce de représenter Walter comme un humain comme les autres, pour lequel on a de l’empathie… mais soudain, on nous rappelle sa dangerosité, contre laquelle lui-même ne peut lutter. Ca fait partie de lui.
Il en naît des situations dérangeantes, mais pas comme on aurait pu l’attendre.
Et le héros est conscient de son problème, "When will I be normal ?", se lamente-t-il.
Pour moi, la fin du film n’est pas la fin de l’histoire. Pour plusieurs intrigues, ça n’est que le commencement, Walter n’en est qu’au début de sa reconstruction… Mais j’estime que ça n’est pas la fin non plus parce que le personnage n’est pas débarrassé de ses pulsions, et je pense que les scénaristes s’en rendaient compte.
Dans le reportage que j’évoquais, on demandait à un intervenant comment il savait qu’il ne recommencerait pas. Il répondait qu’il n’y avait aucune certitude.


The woodsman est plutôt bien écrit, les dialogues semblent naturels, même si ce que j’ai aimé c’est qu’ils soient directs. Le film fait pas de détours, il y a peu de paroles échangées en fait, on va droit au but qu’est censée remplir une scène, et ça ne gêne pas pour autant le naturel de l’écriture.
Et la métaphore qui donne au film son titre, qui aurait pu être lourde si elle avait été davantage appuyée, s’avère bien pensée. Simple, mais évocatrice.
La mise en scène est sobre, mais il y a de bonnes idées, qui véhiculent facilement les intentions de la réalisatrice.
L’image est assez terne, on est souvent dans la pénombre, surtout chez Walter ; l’image n’est pas trop contrastée, pas trop sombre non plus, on est juste entre l’obscurité et la lumière, entre deux. Et ça donne de belles images, même avec des plans tout simples.
Mais c’est surtout le montage qui a retenu mon attention. Le film est lent, calme, une sensation surtout véhiculée par le grand silence qui règne en toutes situations (même quand des personnages regardent la télé, absolument aucun bruit n’en provient), mais le montage se montre parfois dynamique.
Je le trouve aussi très atypique dans certains de ses effets, il y a notamment cette séquence où l’on intercale des plans d’évènements différents, mais très peu séparés dans le temps (quand Walter couche avec Vicki en fait), ce qui est déstabilisant. C’est très inhabituel mais en même temps ingénieux, pour véhiculer au spectateur une certaine sensation.


Un film qui semble essentiel à voir, même si je trouve malgré tout des documentaires ou des reportages plus intéressants pour observer le profil de réels pédophiles. The woodsman présente le portrait d’un pédophile non-exclusif (c’est-à-dire attiré par des femmes majeures aussi), et qui fait preuve de remords. Et par le fait que les attouchements ne soient qu’évoqués, on nous préserve un peu de l’horreur de la réalité. Mais je suppose que c’était la meilleure position à adopter, pour donner à certains une autre vision des pédophiles et faire accepter que ces derniers sont aussi victimes de leur propre condition, voire également de traumatismes qu’ils ont vécu dans l’enfance (même si ça ne semble pas être le cas du personnage de The woodsman).

Fry3000
7
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le 1 mai 2016

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Wykydtron IV

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