Avec ce titre sonnant comme une affirmation prophétique, Paul Thomas Anderson nous fait une bien belle promesse: celle du sang. Mais pas de jets d'hémoglobine ou des démembrements qui font le bonheur des producteurs hollywoodiens.. dans l'Amérique du tournant du siècle, le sang est un liquide noir jaillissant du sol.
Pour peindre son pamphlet anti-capitaliste, Anderson va faire le choix très sage de focaliser son récit sur un personnage. Un personnage incarné par Daniel Day-Lewis qui jongle entre un mutisme étonnant et une éloquence d'une violence très rare. Un personnage qui est introduit dans un silence (quasi) complet; seul le leitmotiv distant d'un brut assourdissant vient attaquer les tympans du spectateur. Un "héros" dont on ne connais ni l'histoire ni les plans.
Ce "chercheur d'or" qui va sans tarder ajouter un noir à ce titre. Un homme d'affaire intelligent et sans scrupules, mais qui semble tout de même parfois capable d'affection (au point d'élever un orphelin pour faire fleurir son business). Un capitalise chanceux qui sait saisir les bonnes occasions et produire sa propre chance.
À ce "monstre", il fallait bien opposer un ennemi. Qui de mieux pour incarner l'ennemi que le fils du paysan volé de ses terres? Ce même fils pasteur dans un église locale, pardi!
Une confrontation perdue d'avance, puisque les "voies du seigneur sont impénétrables.. sauf par des pipelines.
Anderson nous livre ici un pure canvas des méfaits du capitalisme: pas celui du gain de l'argent, celui de la domination. Une soif pour la domination qui va pousser l'homme dans les recoins les plus sombres de son être: peur du jugement, violence, meurtre; jusqu'à se retrouver sans personne à dominer dans le "rien" (du désert) de son existence.. Un néant qu'aucune humeur noir vendue au baril ne pourra remplir. Une déclaration(sic, "statement") très forte pour un film très puissant.