En 1971, en pleine guerre de Vietnam, Bozz, un soldat indiscipliné rejoint un camp d’entraînement.
Il traîne une belle réputation de branleur derrière lui, une réputation pas faussée. Puisque dès son arrivée, il trouve le moyen, de quitter le camion arrière, en se suspendant à la remorque !
Evidemment, il sera puni. Son impertinence face à ses supérieurs : entre blagues en dessous la ceinture et questionnements philosophiques, il les pousse à bout, car en plus, il s’y connaît parfaitement en droit juridique et s’amuse à faire démobiliser ses camarades !
Sa plus belle réplique, à un supérieur suite à une séance de tirs qui finit en bagarre, disant : « Vous êtes morts. », Bozz réponds : « Je peux poser une question ? », « Vas y », il balance : « Si je suis mort : comment je peux poser une question ? », fou rire général. Sans doute inspiré par les répliques du colonel dans « Full Metal Jacket », les supérieurs des soldats multiplient les insultes : souvent des métaphores sexuelles.
Malheureusement les conneries de Bozz impactent sur ses camarades qui se font tabasser en conséquence, lorsqu’ils ne craquent pas psychologiquement après avoir subit des châtiments physiques de leurs officiers instructeurs.
Ainsi, entre les bons mots, il y a de longues scènes de discussions philosophiques, dévoilant la sensibilité de différents personnages, y compris celle de Bozz : qu’on voyait simplement comme une tête à claques anarchiste. Bozz les questionne pour le pourquoi de leur engagement, s’intéresse sincèrement et leur demande : « Qu’est ce que tu viens foutre ici ? », parfaitement conscient qu’ils sont en plein merdier et qu’ils se feront probablement tués au Vietnam.
Car si « Tigerland » prend le parti avec son paquet de dialogues cinglants, de décrire, de dénoncer l’impact d’une guerre sur les jeunes hommes à peine sorti de l’adolescence (l’un d’entre eux à 19 ans) avant même qu’ils aient vécus ! Ainsi le sadisme psychologique, les humiliations des sergents instructeurs les détruisent, oubliant qu’ils font face à des jeunes êtres encore innocents, ce que Bozz est là pour leur rappeler.
Certaines séquences sont très fortes psychologiques, ainsi que l’officier Thomas s’acharne physiquement sur Miter, on a la gorge serrée, Bozz est non loin assiste impuissant à ce qui se passe.
Qui plus est, le film est filmé exactement comme j’adore : en 16 mm, donc image crade, caméra à l’épaule, avec angles originaux, montage assez cut, donc un style documentaire. Même si Schumacher est plutôt léger de ce côté là, il aurait pu y aller plus fort côté plans originaux, préférant les plans larges, ce qui est un peu dommage, la mise en scène manque d’impact.
Mais le film ne se déroule pas seulement au camp d’entraînement, ainsi les soldats ont quelques week end de permission : Bozz en profite pour entraîner Paxton dans un bar et ils emballent deux filles qu’ils baisent dans une chambre d’hôtel : la scène de sexe est très explicite, les fesses, poitrines, pénis.
Ce que j’ai toujours regretté dans « Tigerland », c’est justement vers la fin


lorsque les soldats arrivent enfin à Tigerland : là, il ne se passe plus grand-chose, Bozz semble presque rentrer dans le rang.


La musique est minimaliste, très peu de chansons (si ce n’est celles entendue dans les bars où vont les soldats), le film outre pour ses dialogues cinglants, ses réflexions philosophiques sur les raisons qui poussent des jeunes gens à s’engager dans l’armée, vaut pour son casting, à commencer évidemment par Colin Farrell : ici pour son premier rôle principal, qui à 23 ans impose déjà une présence, aidé par un personnage très consistant, hâbleur mais mystérieux, entouré d’acteurs aujourd’hui moins connus mais avec des physiques reconnaissables : Matthew Davis, Clifton Collins Jr., Tom Guiry, Cole Hauser et même Michael Shannon dans un tout petit rôle.
Le doublage français tient le coup : les dizaines de jurons sont inspirés, bien que quelques imperfections, Boris Rehlinger qui double pour la première fois Colin Farrell ne le capte pas encore totalement : depuis, en le doublant dans 36 autres films (!), il a pu vraiment apprendre et comprendre la présence et le charisme de l’irlandais.
Tu as une belle distribution : Damien Witecka, Didier Cherbuy, Taric Mehani, Lucien Jean-Baptiste, Eric Herson-Maracel, etc., du classique mais qui est fort bien distribué.

Créée

le 2 août 2021

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Derrick528

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