Satire militaire d'époque

Il y a un peu du futur Jean Vigo de "Zéro de conduite" dans ce muet du Renoir des débuts, où l'on aurait troqué l'observation d'un collège par celle d'un régiment. On ne peut pas dire que la comédie militaire soit une réussite, il se montrera beaucoup plus à l'aise et pertinent par la suite : on peut constater quelques tentatives techniques, quelques mouvements de caméra qui se donnent du mal (pour l'époque) pour produire un certain effet original, mais dans l'ensemble "Tire au flanc" reste maladroit et souvent un peu navrant. Le côté potache des gags et de la description du service militaire a particulièrement mal vieilli (encore que, on pourrait trouver du charme à ce style désuet, j'imagine), et joue jusqu'à l'écœurement de l'opposition entre le sort d'un valet (Michel Simon) et celui de son maître, un poète bourgeois (Georges Pomiès) constamment interpelé comme "l'idiot" par les gradés. La poésie, le militaire... Voilà le genre de contraste sur lequel le film se repose, en mettant en scène des brimades incessantes dans la tradition de l'époque. C'est pour le moins poussif, sans compter le fait que la structure est bâtie sur une succession de scènes assez courtes, comme autant de motifs bien identifiés : la maladresse du valet au foyer, l'arrivée à la caserne, la séance de tonte de cheveux, le passage à l'infirmerie, les boutades de chambrée, etc. Je suppose qu'il fut un temps où tout cela était drôle, mais à mes yeux l'exercice est brouillon, très long, et relève d'un loufoque antimilitariste qui s'use très vite sur la durée.