Tom, jeune pubard hipster de Montréal se retrouve dans une campagne reculée du Québec où il vient enterrer son Petit ami, Guillaume. En arrivant à la ferme familiale, complètement isolée, il se rend vite compte que la mère du défunt ignorait tout de la relation qu’il avait avec lui. Le frère, Francis, quand à lui va lui faire vivre un enfer en le brutalisant et le forçant à mentir sur la nature de leur relation pour protéger le souvenir de la mère (en se faisant passer pour un bon ami, et en accréditant l’existence d’une petite amie imaginaire) , puis en allant jusqu’à l’empêcher de rentrer à Montréal en endommageant son moyen de transport.

Avec Tom à la ferme, Xavier Dolan livre son premier « film de genre ». Fini les histoires d’amour pop, ici on est dans le thriller psychologique et paranoïaque, tout en tension, en violence sourde. La mère et le fils, cellule familiale clairement tordue et dysfonctionnelle, gangrénée par les mensonges et le refoulement, seront quasiment les seuls contacts de Tom pendant son séjour forcé. La mère, va progressivement extérioriser son chagrin et projeter sa relation avec son fils sur Tom (Guillaume avec progressivement coupé les ponts avec sa famille et Tom va être ce lien avec lui qu’elle avait perdu). Le frère quand à lui va reporter sur Tom une partie de la relation qu’il avait avec son frère. Son dégout pour son frère, son homosexualité, son statut de gars de la ville qu’il ne comprend pas, lui, ce gars de la campagne qui ne voit que sa ferme, sa mère, les champs, les vaches et les veaux. Il est coincé dans sa vie, dans sa ferme, et clairement tout ça il va le reprocher à Tom en usant de violence, de manipulation psychologique, mais en étant aussi dans des postures plus ambigües, le tout infusé par la nécessité maladive du mensonge. Le désir est présent, sans qu’on sache vraiment si c’est une attirance sexuelle larvée et refoulée ou plus une sorte de jalousie de sa liberté.

Une relation sado-masochiste s’installe crescendo entre les deux hommes, où le dominant et le dominé varient parfois selon les scènes. Et au milieu se trouve une mère douleur terrassée par la perte et gagnée par la folie. Les motivations des personnages sont assez floues, (de plus un mystère plane sur le passé de cette famille, que le reste du village semble éviter), voir inexistantes. La violence dans cette ferme semble être innée, la rendre ou la subir n’est plus un choix mais une solution. Tom lui, reste assez insaisissable : en trois semaines de réclusion pas complètement forcée, il finit par accepter son sort avec une absence d’émotion assez curieuse, comme frappé d’un syndrome de Stockholm. Il encaisse les coups, accepte la domination de et finit par la faire sienne, victime fragile d’un pervers narcissique aux intentions doubles. Pour faire le deuil et survivre, autant se mentir. La facilité avec laquelle tout ce petit monde participe à cette mascarade fait froid dans le dos et trouve sa plus cruelle expression dans le dernier plan du film. Une nouvelle fois il s’agira de tourner le dos à la vérité nue.

Visuellement, le Tom à la ferme est beaucoup plus dans la retenue que les derniers films de Dolan. La palette de couleurs est assez terne, dans les tons de brouillard, de boue, et de maïs séché, relevé parfois de touches de vert acide très intense. J’ai trouvé ça vraiment beau, finalement, presque aussi beau que les couleurs pop des amours imaginaires. La ferme dans le brouillard, avec la présence des bovins est vraiment un superbe décor de film d’horreur ou de terreur, sans pour autant aller dans la caricature. Le paysage est parfaitement ancré dans le réel mais fait aussi très bien office de paysage mental un peu abstrait. Le casting comme l’interprétation sont parfaits. Seule la musique m’a un peu dérangé. Presque trop intense et parfois trop connoté Hermann / Hitchcock
Benjicoq
9
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le 17 avr. 2014

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Benjicoq

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