Voici donc le film qui a fait se gondoler Cannes et dont l'absence au Palmarès a ému tous les festivaliers. Sa réputation n'est absolument pas usurpée avec une multitude de scènes délirantes qui ne sont pas loin de provoquer des fous rires irrépressibles. Mais Toni Erdmann est bien plus que cela et ses 2 heures 42, qui passent très vite, sont d'une très grande richesse thématique. Outre la mondialisation, et les rapports entre une puissance occidentale (l'Allemagne) et un pays émergent (la Roumanie), le film est d'une lucidité et d'une justesse impressionnantes lorsqu'il s'attaque à la vie en entreprise, et notamment dans les multinationales. Stress, sentiments "Corporate", défoulement, dérives, tout y est. Sur le plan émotionnel, Toni Erdmann s'impose avec un éclat tout particulier, au delà de son aspect ludique de Farces & Attrapes, dans une relation père-fille puissante et jamais convenue. Le film semble parfois improvisé comme si la réalisatrice Toni Erdmann avait laissé une grande latitude à ses interprètes, à moins que tout soit écrit, au cordeau. Les deux acteurs principaux sont éblouissants : Peter Simonischek et Sandra Hüller, dans des partitions variées et inspirées. Si le jury de Cannes, plutôt que de couronner un Ken Loach honnête mais attendu, avait voulu prendre des risques et souligner une écriture et une mise en scène brillantes et singulières, c'est Toni Erdmann qu'il aurait choisi sans hésiter.