Sur le papier, cette histoire de père fantasque décidant de redonner le sourire à sa fille cariériste semble attendue. Il n'en est rien. Toni Erdmann étonne et séduit en empruntant sans cesse les chemins de traverse.
C'est un film qui chemine en soi des jours durant, un récit touffu sur une relation père/fille intense qui sort constamment du cadre et dresse en filigrane le portrait d'une Europe en déliquescence. Le lien qui unit ce père farceur et cette fille en apparence rigide est d'une incroyable densité.
C'est une relation évidente et dingue, mystérieuse, un lien surpuissant que la cinéaste illustre avec un impeccable sens du tempo, une imagination et une espièglerie impressionnantes. La rigueur de l'écriture donne vie à un récit qui n'est jamais bordé. Allant de surprise en surprise, découvrant chaque fois le personnage d'Ines sous un angle différent, le spectateur se nourrit d'une richesse narrative dense et profonde.
La preuve est à nouveau donnée ici que le cinéma est affaire d'écriture et de mise en scène. Tout a été dit mais Toni Erdmann le redit autrement et de bien belle manière. Si l'on rit souvent, le film n'est pourtant pas drôle au sens premier, ou alors désespérément drôle, parfois terrible, souvent bouleversant.
Le jeu de Sandra Hüller, tout en nuance et en trouvailles lui permet de se dépatouiller de n'importe quelle situation. Moins surprenant mais tout aussi brillant, Peter Simonischek se pose en parfait contrepoint. Les deux comédiens portent un film qui emporte, soulève et enthousiasme.
Avec Toni Erdmann, Maren Ade impose un talent singulier, rigoureux et vif.