TP. Des initiales explosives. Un jeu flamboyant. Une carrière fulgurante. Des jambes de feu. Du même feu sacré qui vous tire du lit à 3 h du mat’ pour admirer layups et autres teardrops à gogo pendant presque deux décennies. Et pour goûter avec délice la folle ascension d’un gamin à qui rien ne résiste. Surtout pas le rêve américain. Mais quand Netflix revient sur la carrière exceptionnelle du plus célèbre basketteur français à travers un tout nouveau documentaire, le résultat a hélas un goût de déjà-vu. Entre banalité narrative et marketing assumé, notre Tony national méritait mieux que ça…
The Lost Dance
Surfant sur le succès du très réussi The Last Dance, ce documentaire à la gloire de Tony Parker n’a pas l’aura de son modèle. Le format n’aide certes pas : difficile de synthétiser 20 ans de carrière en 90 minutes. Là où le documentaire sur Jordan revenait sur tous les principaux faits d’arme de la légende américaine, TFS se contente de distiller quelques images d’archives sur ses débuts à Fécamp, une poignée de highlights sur ses années aux Spurs et en équipe de France… et puis c’est tout. Ses très modestes 4 championnats NBA, 6 sélections All-stars, un titre de MVP des Finals 2007 et un titre de champion d’Europe 2013 – excusez du peu – sont abordés à la hussarde, sans véritable lien, sans âme.
On perçoit rapidement l’angle choisi : « le challenge c’était de raconter cette histoire connue en France au monde entier », explique comme pour s’excuser Florent Bodin.
Le réalisateur démocratise la légende sans l’écorner, ressasse des anecdotes bien connues sans les sublimer. Et ainsi de laisser de côté les fans de basket purs et durs. Ce panégyrique sur Parker n’est pas un coup d’essai. Tony Parker : 9, un chiffre, un homme n’était guère plus disert sur la narration des succès de TP alors qu’il avait déjà gagné 3 titres NBA et glané 2 sélections All-Star lors de sa diffusion sur Canal + en 2008.
Parker, l’homme d’affaires
Et c’est justement le problème : aucun documentaire n’offre une rétrospective exhaustive du joueur des Spurs. TFS n’apporte aucun nouvel éclairage sur la carrière du monument français. Pire, il promeut un TP en campagne, revient sur ses ambitions et réussites entrepreneuriales comme le rachat de l’ASVEL ou sa tournée promotionnelle en Chine pour sa marque de chaussures. En parfait allié marketing, ce documentaire prend des allures de profession de foi et ne manquera pas d’enrichir un capital sympathie auprès du plus grand nombre. L’homme d’affaire avisé qu’est devenu Tony Parker saura capitaliser sur ce film Netflix pour lorgner la présidence de l’Olympique lyonnais et, à terme, une franchise NBA. Mais tout ça importe peu aux anciens gamins des années 2000 qui l’ont si souvent suivi et qui rêvent encore d’images rares et inédites de ses exploits. À tous ceux-là, on ne saurait trop conseiller Les enfants de Zadar, le documentaire de L’Équipe qui revient sur le parcours du championnat d’Europe Junior 2000 disputé en Croatie, tout premier succès de « la clique à Parker » et étape fondatrice de la carrière du plus célèbre numéro 9.
On retiendra toutefois des interviews de coéquipiers ou de proches parfois hilarantes, souvent convenues mais toujours sincères. Comme celle de Kobe Bryant, dont il est bon d’entendre à nouveau le rire si caractéristique. Il y dit tout le bien qu’il pense d’un Tony Parker dont beaucoup de détracteurs ont moqué la vaine comparaison avec Michael Jordan. La force du documentaire de Florent Bodin c’est peut-être de rendre éternelle la très forte amitié qui liait les deux stars. « J’ai joué contre lui durant de très nombreuses années, et c’est de sa faute si je n’ai pas gagné plus de titres… C’était vraiment un bon gars, même s’il te défonçait sur le terrain. » Cet éloge de la star des Lakers vaut peut-être toutes les comparaisons du monde finalement. Et donne un peu d’émotions à un documentaire qui en manque cruellement.