Un peu comme Working Girl, Tootsie appartient à une époque où aborder des sujets aussi glissants que le genre, l'identité sexuée et la sexualité, donnait un résultat qui peut faire bondir à plus d'un titre aujourd'hui.
Reprenant les tropes classiques du travestissement, tout y passe, des quiproquos sexuels, de la question de l'homosexualité, de "est-ce qu'une femme peut être directive ou sa sensibilité la freinera toujours ?", les hommes viennent de mars/les femmes viennent de vénus, bref : tout-y-passe, avec plus ou moins de subtilité. Pourtant, l'ensemble est sauvé par une étrange sensation mélancolique qui traverse le personnage-titre de Tootsie/Dorothy/Michael, celle d'un homme odieux qui pense que le personnage féminin qu'il essaie d'incarner, et qui lui échappe quelque peu, vaut bien mieux que ce qu'on lui fait subir (et vaut bien mieux que sa version masculine).
Flashforward, quand soudain, voir cette interview (assez récente) de Dustin Hoffman à propos de sa composition dans Tootsie éclaire le film sous un jour nouveau. Il y révèle, les larmes aux yeux l'épiphanie qu'il a eue, en préparant le film. Se rendant compte que, une fois grimé en femme, il n'était pas "séduisante", il déclare avoir voulu faire le film parce qu'il était persuadé que la femme qu'il était ainsi devenu était quelqu'un d'extraordinaire qui n'aurait pas été jugé à sa juste valeur, à commencer par lui-même, à cause du physique. "Je suis passé à côté de trop de femmes fantastiques, parce qu'on m'a lavé le cerveau, et pour moi, ce film n'a jamais été une comédie."
Le film n'est ainsi pas seulement une comédie random sur le travestissement mais un putain de gender manifesto par un acteur bouleversé par la condition féminine. D'un coup, wow.