"Tootsie" est un film étonnant, charmant, revigorant. Un régal de cinéma pour qui aime les situations anachroniques sur fond de travestissement (*). Mais aussi et surtout pour tous ceux qui, d'habitude, fuient ce genre-là, parce qu'il y a de fortes chances qu'ils changent d'avis après avoir vu l'inimaginable : Dustin Hoffman en jupe-culotte moulante !
Oui, cette fois, c'est bien lui qui se prête au jeu - un pari délicat - du travestissement dans la 1re comédie du réalisateur de l'inoubliable "On achève bien les chevaux", Sydney pollack. Il y est une nouvelle fois égal à lui-même, c'est-à-dire prodigieux ! Trouvant là un rôle qui marque autant sa carrière que celui dans "Le Lauréat".
Son interprétation est époustouflante et le film une petite merveille de comédie. Drôle sans facilités. Parfois émouvante sans le mélodramatique.
Au début, le scénario est plutôt classique. C'est un moment de la vie de Michael, acteur très doué mais doté d'un caractère impossible. D'ailleurs, il est au chômage, aucun producteur ou réalisateur ne voulant supporter ses sautes d'humeur, ses intransigeances. Tentant alors un audacieux recyclage, Michael se mue en Dorothy, actrice sans passé artistique - et pour cause - et arriviste. "Elle" va connaître une révélation fulgurante en décrochant un rôle dans un feuilleton ringard.
Suit une succession de situations hilarantes, jusqu'au quiproquo insurmontable : le puissant sentiment amoureux que Michael-Dorothy va d'emblée nourrir pour sa très jolie partenaire (Jessica Lange - ou l'ange ! - éblouissante de féminité solaire). Le final propose un agréable rebondissement...
Dustin Hoffman, l'excellence de jeu incarnée, s'est surpassé pour "Tootsie". Jamais, peut-être, en terme de jeu, un acteur n'est allé aussi loin de lui. Il s'agit d'un personnage hors normes pour deux raisons au moins. Un : il a dû travailler toute une palette de nuances pour donner une plausible vérité psychologique à Dorothy. Deux : plus admirable encore, il a dû subir un calvaire de maquillage pour se transformer physiquement. Car on ne peut pas dire qu'il a, au naturel, des traits féminins !
Et pourtant, le résultat est sidérant. Tout le monde s'y laisse prendre. Dans le film, puisque l'irrésistible Dorothy décroche facilement le rôle au milieu de pétulantes postulantes. Et dans la tête du spectateur, qui découvre un charme certain à cette femme qu'il voit évoluer sur l'écran.
Dans les deux cas, Dorothy est "la Lauréate" (pardon, Mrs Robinson, mais c'est plus fort que moi !).
(*) Des comédien(ne)s changeant momentanément de sexe le temps d'un rôle : pari souvent gagnant.
L'histoire du Cinéma multiplie les exemples célèbres : Tony Curtis dans "Certains l'aiment chaud" ; Katharine Hepburn dans "Sylvia Scarlett" ; Helmut Berger dans "Les Damnés" ; Julie Andrews dans "Victor, Victoria"... Entres autres.
Mais "Tootsie" est si... !