Pour le masqué, devant les premières minutes de Totto-Chan : La Fille à la Fenêtre, c'était pas nécessairement gagné. Car comme vous le savez sans doute, il faut qu'il trouve un moyen de s'attacher au personnage principal pour totalement adhérer.
Or, la petite et turbulente Totto-Chan, c'est une tornade qui ne tient pas en place, doublée d'un véritable moulin à paroles. Soit une gamine pour laquelle la ritaline devait être inventée pour en venir à bout.
Pareil pour la description couleur rose bonbon de cette école alternative idéale, digne des fantasmes les plus édifiants d'un fasciste de gauche tendance mai 68.
Le masqué prenait donc un peu sur lui au départ. Soit sans doute, de mémoire, l'une des premières fois devant un animé dans une salle de ciné.
Et puis, petit à petit, le charme de Totto-Chan agit. En atténuant tout d'abord le trouble de l'attention de sa petite héroïne, en la faisant peu à peu trouver sa place aux côtés de ses petits camarades et au sein de cette école qui prend des allures de véritable oasis. Pour la faire devenir maligne, malicieuse et enfin attachante.
En dessinant ensuite nombre de vignettes mignonnes de sa vie scolaire, où elle prend autrement, tant les savoirs académiques qu'un savoir-être simple et pur, presque désuet quand il est regardé avec les yeux cyniques de notre époque posés sur le Japon de la seconde guerre mondiale. Soit la description, à l'abri du monde tumultueux des adultes, d'une éducation positive et bienveillante dans un établissement atypique tenant lieu de véritable coeur humaniste à l'oeuvre.
En illustrant enfin une très jolie histoire d'amitié en forme d'ode à la différence, ou encore le portrait d'une enfance fantasque et libre, faite de douleurs personnelles, de grands bonheurs et de chagrins qui le sont tout autant. Et débordante d'imagination, à l'image de quelques superbes échappées mises en scène sur le mode de l'esthétique fantastique et de l'onirisme enfantin.
Et il y a enfin, de manière d'abord lointaine, les vagues de cette Grande histoire murmurant tout d'abord dans le coquillage de cette enfance insouciante, avant d'en fracasser les côtes dans la dernière ligne droite du film, qui bascule alors plus franchement dans une certaine forme de drame. Un tel mouvement, annonçant les privations et la réalité de l'engagement japonais dans le conflit, teinte le récit de Totto-Chan d'une illustration de la fin d'une innocence poignante, qui prend par surprise en plusieurs occasions dans sa manière d'appréhender l'émotion.
Le film, toujours terriblement juste, a beau se finir dans les flammes des bombardements, il reste cependant de Totto-Chan, à la fin de la séance, comme une note d'espoir que le conflit mondial n'aura jamais réussi à faire taire, comme une insatiable envie de vivre qui prend immédiatement au coeur.
... Et qui ont vaincu les réticences initiales du masqué.
Behind_the_Mask, qui redoutait de se retrouver devant des blagues de Tot(t)o.