Tout le monde aime Jeanne suit le schéma de la comédie romantique tout en empruntant des chemins de traverse réussis qui lui confèrent une certaine originalité. Jeanne, petite quarantaine, célibataire, entrepreneuse environnementale déchue de son piédestal de star écolo nationale, se retrouve à Lisbonne pour vider et vendre l'appartement de sa mère récemment décédée dans le but de rembourser ses dettes.
Seule face aux cartons vides, accompagnée par un ancien camarade du lycée français très marginal, rejointe par son frère, Jeanne va peu à peu sortir de sa léthargie dans les rues de Lisbonnes, au gré des rencontres.
Le film prend des airs de voyage initiatique, puisque le dépaysement à Lisbonne symbolise le retour des souvenirs d'enfance et de sa mère, pas toujours les plus doux. Le dépaysement pour le spectateur est aussi esthétique, avec l'intrusion régulière de la voix intérieure de Jeanne via une petite créature volubile et sans filtre. Plein de légèreté et d'humour, ce graphisme ponctue de nombreuses scènes et est une réelle plus-value: il souligne le ridicule des situations du quotidien ou prend le contre-pied de la scène tout en amenant des pauses dans le récit.
Réaliste, consciente des absurdités de ce monde, dotée d'un ego qui pèse son pesant de cacahuètes, dans le déni de son mal-être et résolument émotive, Jeanne représente un moi contemporain avec lequel certains s'identifieront sans mal et avec délice. La rencontre entre Jeanne et Jean est une histoire d'amour à contre-courant du romantisme classique de cinéma, Jean étant un cassos fini, tranchant avec Jeanne, Parisienne jusqu'au bout des ongles.
Le récit en lui-même n'est pas spectaculaire, mais le mélange entre film du réel et film d'animation est une proposition convaincante, qui nous invite indubitablement à aimer, si pas Jeanne, au moins le film !