Le hasard fait plutôt bien les choses : je choisis au hasard un des Godard que je n'avais pas encore vus, histoire de rendre à ma hauteur un hommage à ce cinéaste si important pour moi, et voilà que je tombe sur ce qui ressemble à son film-somme.
Ca commence comme un pastiche du Mépris, un homme dit à sa femme qu'il aime son cul, il assiste à une séance de projection, mais ce n'est plus le récit d'Ulysse ; c'est une pub pour rasoirs. Travelling gauche-droite droite-gauche. Le film fourmille de dialectique, la parole est donnée aux patrons, au syndicaliste, aux non-syndiqués, aux communistes, aux gauchistes, à l'intellectuel fatigué. Le couple se méprise, comme dans Le Mépris, mais ils trouvent une solution à leur problème : ré-encastrer leur histoire d'amour et de sexe dans le social, et in fine dans l'histoire. Travelling gauche-droite droite-gauche.
C'est drôle, c'est brillant, c'est virtuose, c'est didactique et contradictoire. Ni esthète ni révolutionnairement puriste (rien ne se suffit plus tout seul). En Montand se dessine un portrait en creux du cinéaste. J'en avais besoin ce soir. Film génial.
J'étais triste aujourd'hui puis j'ai appris que Godard avait eu recours au suicide assisté. Cela me console de savoir que, jusqu'à la toute fin, il aura fait comme il a toujours vécu : n'en faisant qu'à sa tête. Chapeau l'artiste, et il reste maintenant cette oeuvre prolifique, qui ne s'épuisera jamais en significations, en plaisir, en analyses. Au contraire.