À partir de 1968 Godard va s'employer avec persévérance à détruire son statut de vedette et va disparaître dans le groupe Dziga Vertov, ne réalisant plus que des films militants qui ne sortiront pas en salle et ne seront vus que par une poignée de personnes. « Tout va bien », marque son retour au cinéma « commercial », tout au moins à une grosse production, décors de studio et, surtout, vedettes. « Tout va bien », titre à la fois ironique et rageur, aussi bien par rapport à la situation de la France en 1972, qui ne va pas bien, qu'à la situation du gauchisme qui va plus mal encore. Comme l'écrira le philosophe Alain Badiou : « Tout va bien est une allégorie du gauchisme finissant. C'est un film consacré à ce qui a eu lieu entre 1968 et 1972, mais qui ne peut et ne veut s'y consacrer que sous l'hypothèse inexplicite (inconsciente ?) d'une fin. Plus précisément : de la fin d'un commencement. » Le film n'en comporte pas moins d'extraordinaires moments de cinéma notamment avec ce décor d'usine où toutes les salles, pièces, bureaux, escaliers sont construits en coupe comme dans une maison de poupée, hommage au film de Jerry Lewis The Ladies'man (Le tombeur de ces dames) que Godard admirait beaucoup, ou encore cet incroyable et magnifique plan séquence dans un hypermarché Carrefour. Comme le fait observer Matthieu Bareyre (critikat) Tout va bien est « la reconstitution d'un passé proche sous la forme d'une farce triste ». Le film se termine par un long travelling sur des terrains vagues, symbolisant la désolation politique, avec la musique du tube de l'année de Stone et Charden « Il y a du soleil sur la France (et le reste n'a pas d'importance) ». Entre rage et désespoir !