Avec une introduction d'un exhaustif presque sociologique, qui navigue entre les divers membre de cette famille de 11 personnages dans leurs activités quotidiennes, le ton est donné: on va vivre l'épisode turbulent et formateur d'une famille pauvre, dont l'apparente stabilité superficielle repose sur de lourds déterminismes sociaux comme tant de pièges à loup acérés retenant la liberté et l'épanouissement de ses membres.
Naruse écrit le scenario de ce film adapté d'un roman, l'histoire de l'ainé de la famille voulant faire une école d’électricien afin de donner un sens à sa vie autre que la pure survie au jour de le jour toujours le fil, et aider sa famille. Mais étudier serrait abandonner son travail, et donc des revenus primordiaux, le fil en question serrait rompu. Naruse avant de faire cinéaste avait tenté l'école d'ingénieur, avant de devoir arrêter pour subvenir aux besoins de sa famille en difficulté. Je pense que ce film fait écho à cet épisode de sa vie quelque part.
Mis à part la scène d'introduction brillante, c'est un drame doux amer, extrêmement amer sous son apparente douceur, une violence sociale puissante y est dépeinte via les angoisses et les résignation des enfants face à leur destin tracé. Le pleur chez Naruse est toujours déchirant, d'un fatalisme dont les personnages ont conscience et qui provoque ce dernier cri du cœur face auquel on a l'impression d'être impuissant, sous cette pluie assourdissante, sans musique, dans la nuit, avec ces visages de tombes qui entourent l'ainé.
Politiquement Naruse semble toujours se trouver dans une ambiguïté de traitement des capacités de l'homme à influencer sa vie face à la société, mais moins que d'habitude, ce qui m'a fait en fait fait questionner la manière dont Naruse filmait les classes populaires. S'il n'est pas un marxiste convaincu, je pense que le traiter de réalisateur de droite ou méritocrate est aussi une impasse.