Les films larmoyants, "tires larmes", ont cette caractéristique commune de constamment taper dans le faux, du moins en apparence.
Le faux, cet ennemi de la qualité, qui gâche tout, le rabat joie de l'art.
Mais si le larmoyant attire le faux, il faut bien comprendre que c'est parce qu'il est souvent utilisé par des fainéants, des gouffres emplis de vide qu'on nomme réalisateurs, titre aussi accordé à des génies comme Fassbinder ou Renoir.
Car si je ne pleurs pas devant "La Ligne verte", l'horrible, c'est bel et bien parce qu'en plus de me prendre pour un idiot, il me prend pour quelqu'un qui a assez de mauvais gout pour accepter d'être stimulé positivement par ce genre d'ignominie. La limite du pathos n'est que parallèle aux limites de son propre instigateur. En voilà la preuve.


Le sublime film de Kinoshita est une œuvre qui ne se refuse pas de vivre. La pudeur des sentiment, et bien c'est pour Bresson. On y voit les gens pleurer, renifler, rire, et encore pleurer, chose qu'ils font souvent et même un peu trop rapidement à mon gout. Cependant il faut comprendre que ces pleur sont dans le plus beau des cadres, dans la plus belle des histoires et surtout qu'ils ne sont pas pleurés pour rien. Nous sommes confrontés ici à la fureur de la guerre, de la pauvreté, de la société. On dormirait, si c'était Darabont le réalisateur. Mais ici le crétin du cinéma américain n'ayant à cette époque pas donné signe de vie, c'est à un réalisateur talentueux qu'on donne les reines. On ressent pendant tout le visionnage le désir de créer une fresque, de faire ressentir les années qui passent, et qui petit à petit se précipitent et vont trop vite. Plus on avance dans le film, moins il détaille la tranche de vie proposée jusqu'à l'arrivé au bout de l'impasse, où ce dernier prend 30 min pour exposer le crépuscule dans son histoire.
Et de fresque ce film à toutes les qualités. Il est à la fois une étude méticuleuse des sentiments et de la nature humaine, surtout qu'il a comme qualité de la retravailler car les personnages évoluent, leur environnement se nuance et leur caractère aussi. Il propose aussi un délicat amoncèlement d'images magnifiques, de plans qui dévoilent, comme le découvrirait un aventurier, les différentes facettes et parties de l'île, que ne va jamais quitter l'institutrice, sauf une fois, pour un souvenir à jamais gravé dans sa mémoire: le visage d'une jeune fille à la vie brisée, une de ses anciennes élèves, déjà introduite avec violence dans le monde des adultes hypocrite et sans pitié, personnifié par la figure de sa nouvelle mère. Les émotions sont mêlées entre elles. On ne passe du rire au larme, qualité médiocre d'ailleurs, mais les émotions disparaissent et réapparaissent, se fondent l’une dans l’autre et forment un tout marquant et dévastateur, car le film nous intègre dans son histoire à laquelle on croit de par son vrai immuable. Et pour rendre sa fresque intemporelle dans sa propre temporalité, Kinoshita réussi à placer des moment "iconiques" (pas dans le sens de Spider-man hein), ces moments dont on va se souvenir de par leur singularité. Ils forment à la fois des moments de grâce uniques et créent une harmonie parfaite qui rend le visionnage délectable.
(Je pense notamment à la photo qui sert d'affiche au film et de liaison à travers les 20 ans d'histoire que parcoure le film)


C'est aussi un film qui fonctionne sur un principe d'opposition, du moins c'est ce que j'ai ressenti. C'est même comme ça que sont exprimées la plupart de ses messages et thématiques. Par exemple, la manière qu'à Kinoshita de filmer en plans très larges l'île, pour lui donner une allure immense, alors qu'on va suivre l'histoire d'un microcosme qu'on ne quittera jamais. L'opposition entre la première course en bicyclette et la dernière, qui avec d'autres scènes miroir, renvoient à la thématique de naissance et de destruction du film.
En effet, nous sommes face à un récit, sur des enfants, mais aussi sur la guerre. La relation entre création et destruction s'exprime bien sur aussi dans l'existence du couple principal, un militaire et une institutrice, celui qui créer la mort, et celle qui donne et enseigne.


Le film est généreux et communicatif, mais en évitant l'artifice de part sa recherche de pureté dans la mise en scène, pour créer le sublime à chaque instant. J'étais sur en le regardant qu'il allait me plaire, je suis conquis, et je peux dormir tranquille en ayant vu ce chef d’œuvre absolu du cinéma.

Abrom
10
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le 20 déc. 2021

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Abrom

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