Film fait à l'arrache, sur un coup de tête, par une bande de potes, Tranquilou se ressent fortement de ses conditions de réalisation. Pour autant, cela parvient à lui conférer un indescriptible côté attachant.
Plans sans imagination, quand ils ne sont pas franchement moches, transitions à la Windows Movie Maker – qui nous rassurent sur le fait que ce côté amateur est pleinement assumé – jeu d'acteur qui laisse à désirer... On sent vraiment que tout a été fait avec les moyens du bord. Quant à l'humour, dont la veine principale consiste en un choc des cultures entre un ersatz de pègre citadine et leur cousin beauf dans un camping sauvage, on est à peu près au niveau d'un Camping ou d'un Bienvenue chez les Ch'tis... De quoi se dire qu'il s'agit là d'un film à fuir à tout prix.
Pourtant, il se forme entre l'aspet carton-pâte de la réalisation et l'humour de seconde main une étonnante symbiose qui, neutralisant le désir de prendre un recul critique, nous permet d'apprécier ce film avec un premier degré absolu, et d'atteindre, plutôt que la crispation mi-gênée mi-coléreuse que l'on pourrait attendre, un état de sincère détente.
Tranquilou donne un peu l'impression de revoir ces films que l'on faisait, enfant ou jeune adolescent, entre amis avec la caméra d'un téléphone portable (personnellement, mes plus grands chefs d'oeuvres sont Star Wars, épisode 7 : Les Siths Reviennent et Sherlock Holmes et le Vol de la Cornemuse Sacrée). Une nostalgie étrange et attendrissante qui nous donne presque l'impression d'être dans le film, nous aussi, et d'en connaître intimement les personnages – ou plutôt devrais-je dire de s'en agacer intimement.
Il n'y aura probablement rien à retenir de Tranquilou, en l'absence de dialogues piquants ou de plans marquants. Mais c'est un film qu'il vaut de voir pour le présent de lui-même, pour cet instant, aussitôt englouti, où on le découvre pour la première fois, après avoir, pour une fois, déposé devant l'écran les armes acérées du sens critique.