Trap
5.5
Trap

Film de M. Night Shyamalan (2024)

Il n’y a pas vraiment de nécessité d' ajouter de l’eau au moulin en introduction, tout le monde sait que Shyamalan, ancien maître du twist passé expert du high concept, peine à fédérer l’enthousiasme depuis bientôt vingt ans, à l’exception du sursaut Split. Et pourtant, tous les deux ans c’est la même rengaine. Un synopsis aguicheur, une campagne promotionnelle qui fait monter la mousse, et puis les gens voient le truc et sont déçus (ou confortés dans leur désamour pour les moins optimistes). Après Knock at the Cabin qui fait partie des pires productions du bonhomme que j’ai pu voir, je n’ai pas tenté la salle pour Trap, lui préférant City of Darkness (grand bien m’en fit).


Et pourtant, peut-être car je n’en attendais absolument rien, je n’ai pas détesté cette dernière itération d’un cinéma qui ne repose que sur du conceptuel. C’est très mal fagoté, et perclus de problèmes sur lesquels je reviendrais plus tard, mais j’ai réussi à transformer mon visionnage grâce à une référence extérieure que je dévoilerais par la suite. Car toute la première partie qui se déroule dans l’arène du concert, où le tueur Cooper (Josh Hartnett qui fait bien le taf et que l’on a plaisir à revoir plus présent sur nos écrans) cherche à échapper aux forces de l’ordre, est totalement absurde. Tout le monde balance des informations relatives à la sécurité sans sourciller, informations que le FBI lâche volontairement à des vendeurs de t-shirt. FBI dont l’illogisme du plan laisse pantois. Le film demande une suspension consentie de l’incrédulité que je ne lui aurais pas accordé si je n’avais pas compris ce dont il s’agissait vraiment ici : une adaptation de la licence vidéoludique Hitman. Vous savez, ce grand chauve tatoué d’un code barre dans la nuque qui est aussi remarquable dans une foule qu’un loup dans un troupeau de moutons, qui concocte des pièges à la Home Alone pour faire diversion et se débarrasser des gardes, qui change de déguisement et chaparde des clés de sécurité en deux, temps trois mouvements… Tout ce que va faire Cooper, avec la même tonalité absurde en décalage avec la tension environnante. Cooper est l’Agent 47, et la salle de concert de Philadelphie son terrain de jeu. C’est à travers ce spectre, me faisant faire abstraction de la connerie abyssale de l’ensemble, que j’ai pu relativement apprécié cette partie de cache-cache.


Malheureusement, on nous sort du concept dès la moitié du film pour nous amener à l’extérieur, dans une seconde partie d’un académisme confondant. Les talents de mise en scène de Shyamalan permettent une scène de tension là, une performance d’acteur prenante ici, mais tout cela est au service de la même connerie qu’au début sans le filtre conciliant que j’accordais dans l’arène. Alors on déroule le fil avec des évasions et infiltrations à la Scooby-Doo, tout en donnant le beau rôle à la fifille, pop-star vertueuse qui n’hésite pas à jouer l’héroïne sans jamais douter. Deux points népotisme dans ta face pour la famille Shyamalan cette année (avec The Watchers de son autre fille), papa ayant peut-être pris goût pour la chose lorsqu’il a réalisé la commande After Earth pour Will Smith et son fiston. Une critique extradiégétique qui n’aurait pas lieu d’être si le personnage de Raven n’avait pas été aussi lisse, tant dans ce qu’elle représente que dans son jeu et sa musique.


Je pense que sans le parallèle avec Hitman, je n’aurais pas pu être aussi généreux dans ma notation. Mais n’ayant pu m’empêcher de constater les similarités, et acceptant donc d’être dans un comique absurde, j’ai passé un moment plutôt agréable, du moins au début…


Frakkazak

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