Des dialogues énoncés sans contexte, dont on n'est pas toujours sûr de comprendre la signification profonde mais qui semblent limpides pour les personnages qui les énoncent et les reçoivent, qui reviennent toutefois percuter les synapses tout au long du film et même après. Pas de doute, nous sommes bien face à un film d'Arnaud Desplechin.
La relation, bien qu'éminament bourgeoise, entre Seydoux et Podalydes est toutefois savoureuse. Toujours filmée de façon à ce que l'on ait l'impression d'être spectateur par accident d'une scène qu'on aurait pas dû voir. Ils partagent une relation unique, aussi charnelle qu'intellectuelle dont on se délecte à chaque instant.
C'est sans aucun doute le meilleur rôle de la première, même si elle avait déjà été excellente dans La Vie d'Adèle et quasi figure christique dans France. En ce concerne Denis Podalydès, il n'a jamais semblé aussi flamboyant, ce rôle, d'un écrivain doux mais un peu manipulateur, attentionné mais égoïste semble le rajeunir. Peut-être est-ce dû à ses cheveux grisonnants... Le personnage de Philipp conserve ce côté ingénument simple et gentil que Podalydès sait donner à tout ce qu'il incarne, tout en révélant une propension à semer la tristesse dans le coeur de celles qu'il séduit. Toutes les femmes semblent marquées (hantées ?) par la figure de cet amant, sans que l'on en connaisse la raison précise.
L'avant dernière scène de crise conjugale entre un Philipp et sa femme qui découvre son adultère via son carnets de notes nous fait douter, en même temps que cette dernière de tout ce que l'on vient de voir. Philipp clame que la relation adultère n'a jamais existée que dans sa tête, qu'elle est un carburant à l'écriture. Revient alors en mémoire le découpage en actes ou en chapitres, forme éminament propre à l'écrit et au roman. On se souvient de cette conversation avec un certain ami tchèque qui tourne à la discorde, de ce procès fantasque, de ces amantes qui apparaissent à l'écran, resurgissant d'un passé lointain, réel ou imaginé, de l'écrivain. Qu'en est-il de tout cela ?
Petit regret, on aurait bien aimé ne pas savoir, mais le salaud nous a bien eu. La maitresse anglaise que Seydoux incarne a bel et bien existée et a même lu le livre dont elle a fait l'objet. . Personnage hautement complexe, semblant faire de sa vie un fardeau ridiculement lourd, comme chacun sait le faire, elle ne peut trouver la plénitude dans cet amour adultère, elle ne peut non plus se résoudre à quitter ce mari étranger, dont nous verrons à peine l'incarnation. Condamnés à vivre sans vivre ensemble, les deux amants témoignent de la complexité et de l'infini évantail de sensations que procurent une connexion du corps et de l'âme.