Il me fait chier votre Schubert !
http://www.youtube.com/watch?v=KkqDEh-fXVI
Un point de départ on ne peut plus simple pour un film qui ne l'est pas du tout !
Un homme est marié avec une femme qui a l'air d'être sa maîtresse et tombe amoureux d'une femme qui est assez fade pour avoir l'air d'être sa femme.
Bernard est marié à Florence, femme exceptionnellement belle qui lui assure un statut social et sa place au sein des notables de la ville.
Il dirige un garage qui fonctionne bien et a de beaux enfants. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles jusqu'au jour où...
La secrétaire de Bernard tombe malade et une agence d'intérim lui envoie Colette , petite, rondouillarde et avec des lunettes (portrait peu ragoutant pour un homme, il faut bien le reconnaitre) qui va changer sa vie.
Il ne s'agit pas ici d'une énième variation sur le thème archiéculé du triangle amoureux mais bien d'une œuvre originale dans sa construction à la fois non linéaire, elliptique et onirique. Chez Blier, on sait que le traitement de ce thème souvent abordé, réserve toujours des surprises. Je ne dirais pas qu'il s'agit ici d'un chef d'œuvre mais bien d'un film important dans son message, qui nous habite longtemps et finit par faire partie de nous car il nous offre quelque chose d'unique et de sensible. Evidemment, je ne parle QUE pour moi !
Il ne paraît pas grand chose, une simple anecdote à la croisée des routes de plusieurs carrières/talents mais il y a pour moi, ici une valeur ajoutée qui en fait toute la saveur et la valeur.
Il tombe amoureux de cet être sans charme, invisible mais dont le cœur, la générosité, l'empathie, l'intégrité le séduisent et le font se sentir bien et heureux. Il prend avec elle et son corps "indésirable" un plaisir qu'il ne soupçonnait pas.
On ressent toute la lâcheté de cet homme qui se partage entre ses deux femme et toute la douleur qu'elles ressentent l'une comme l'autre. D'ailleurs, on le ressent dans les multiples boucles narratives, Bernard n'est à l'origine de rien, il est passif, lâche et se laisse porter.
La première femme soufre d'être délaissée pour une moche, d'avouer l'impuissance de sa beauté, un lourd fardeau, la seconde d'être méprisée, (même si elle "suce très bien" (c'est pas moi, c'est François Cluzet qui le dit) et moquée.
Car oui, les "amis de Bernard se moquent de la bonne Colette, ridiculisent cette relation et cette femme.
D'ailleurs, on assiste au seul vrai acte de courage de Bernard (fantasmé) quand dans un monologue magnifique qu'il est forcé de prononcer, crie haut et fort les qualités de cette femme qui sait donner (son cœur et du plaisir), aimer comme personne.
Dans la scène du dîner, le monologue de carole Bouquet qui exprime son désespoir avec sa beauté glaçante montre que personne d'autre qu'elle n'aurait pu incarner Florence ; qu'elle tient ici le meilleur rôle de sa carrière.
Balasko montre le fabuleux talent qui l'habite dans ce rôle ingrat mais magnifique.
Dans la scène où elle crie son bonheur, elle resplendit, éclaire de sa joie qu'elle veut partager les passants étonnés et perplexes.
A force de garder le cul entre deux chaises, de ne rien décider, de se partager avec ces deux femmes sans se rendre compte qu'il les fait souffrir, Bernard laisse le destin prendre LA décision pour lui et se retrouve face à...
=> Si vous ne le savez pas, allez voir le film !