The Dude en shérif patibulaire, rien que ça c'est une idée de génie. Une scène résume bien l'acteur exceptionnel qu'est Jeff Bridges : après avoir contemplé le cadavre un pendu, au milieu d'une forêt déserte, il voit arriver un cavalier, et se prépare alors à une éventuelle attaque. Son regard à ce moment là glace le sang, et fait passer les plus sales gueules d'Hollywood pour des enfants de chœur. Superbe, comme sa voix rocailleuse à souhait tout au long du film, qui semble arriver directement de ses boyaux pleins de whisky sans passer par sa gorge.
Et puis il y a l'esthétique du film elle-même : c'est un western tourné le plus souvent la nuit, sous la pluie, la neige ou un soleil blafard, un Ouest sauvage et dur où l'on chevauche jusqu'à faire crever les canassons, où les gentils recueillent autant de plomb que les méchants, où la mort des hommes rythment les jours. Mattie Ross, la petite héroïne du film (l'actrice -Hailee Steinfeld- est d'ailleurs très chouette, une présence et un bagout vraiment exceptionnels), débute et termine de la même manière, devant un cercueil, d'abord celui de son père, puis celui de Rooster Cogburn, qui est en fait son père par substitution.
Mais le tout est porté avec entrain et humour : les personnages de Bridges, bourru à souhait, et Matt Damon, beau gosse trop bavard, donne à l'ensemble une légèreté indispensable. Bref, du très bon Cohen, le genre d'où l'on sort avec mélancolie et sérénité mêlées.