Bien que vraie et adaptée d’un fait divers américain n’ayant jamais traversé l’Atlantique, l’histoire de TRUE STORY est un poncif narratif : un journaliste en quête de reconnaissance déniche l’histoire de sa carrière en la personne d’un détenu accusé d’un quadruple homicide. Scoop contre tribune, les deux hommes vont développer une relation d’interdépendance. Mais qui utilise l’autre ? Qui ment ? Longo a-t-il vraiment assassiné sa famille ? Finkel peut-il décemment prêter sa plume à l’accusé plutôt qu’aux victimes ? Suspens terrible.
C’est donc plutôt du côté du casting –inattendu– que le film puise sa force. En tête d’affiche : deux acteurs reconnus pour leur versatilité, amis dans la vie et dont les échanges sur grand écran s’étaient pour le moment fait sur le mode comique autour d’une barre MilkyWay (formidable THIS IS THE END).
A ma gauche : Jonah Hill. Tout en rondeur, la bouche en cœur, les yeux bleus perpétuellement écarquillés. On déduit de son look de banquier belge et de ses lunettes à grosse monture qu’il va nous servir son interprétation grave. Car oui, en dépit des louanges dont il fait l’objet, Jonah Hill ne brille pas dans le drame. Son jeu dans TRUE STORY est une variation terne de ses rôles dans MONEYBALL et, plus gênant, THIS IS THE END (comment ne pas entendre le culte « I’m Jonah Hill… from MONEYBALL » dans sa manière de répéter « I’m Mike Finkel… from the NY Times » ?). Le tout est convaincant quoiqu’un peu lisse ; la faute au personnage ? Il ne fait finalement pas le poids face à son partenaire à l’écran.
Le très sous-estimé James Franco n’est jamais meilleur que lorsqu’il joue les déséquilibrés, les flambeurs, les mégalo. Il a cette capacité d’allumer son regard d’un éclair de folie ou, au contraire, de l’éteindre jusqu’à le rendre froid et insondable. Au cours des cent minutes de TRUE STORY, il use et abuse de ce talent jusqu’à rendre son personnage illisible, imprévisible et donc parfaitement fascinant.
Le spectateur accompagne donc Finkel dans les aléas de sa relation avec Longo : il réfléchit et se protège, il compatit, il doute. Le plaisir éprouvé à se sentir manipulé est la preuve que le film utilise efficacement les ficelles du genre. On se prend donc à regretter l’enchaînement un peu trop rapide des évènements, qui laisse peu de temps aux personnages pour s’installer (Félicity Jones devait disparaître ou être creusée, mais ne méritait pas cet entre-deux) ou au suspens pour infuser. L’intérêt du récit reposant uniquement sur le doute (Où est la vérité ? Quelle est sa valeur ?), le spectateur aurait souhaité rester plus longtemps sur le grill, entre les mains expertes de James Franco. La vérité éclate bien trop tôt pour être vraiment surprenante, et prive la conclusion de la gifle qu’elle aurait dû infliger.
C’est dommage, mais pas inintéressant pour autant. TRUE STORY n’est pas le film palpitant qu’il aurait dû être, mais offre à ses acteurs une jolie vitrine où exposer leur talent. C’est déjà ça.