James Vanderbilt a une carrière étrange. D’abord scénariste, il est capable d’écrire le meilleur (Basic pour John McTiernan, Zodiac réalisé par David Fincher) comme le pire (les Amazing Spider-Man, même s’il ne doit pas rester grand chose de son travail dans le résultat final). Pour sa première tentative en tant que réalisateur, il a heureusement choisi de s’inspirer de son meilleur en adaptant le bouquin de Mary Mapes intitulé « Truth and Duty: The Press, the President and the Privilege of Power ».
Mary Mapes est une journaliste d’investigation américaine ayant travaillé pour la chaine CBS et l’émission 60 Minutes. Comme le montre le film en introduction, c’est son travail qui a mis en lumière le scandale des sévices infligées aux prisonniers irakiens à Abu Ghraib en 2003. Elle a aussi cherché, et c’est à cela que le film s’intéresse, à démonter que George W. Bush a été exempté de guerre du Vietnam suite à un traitement de faveur et ce, à quelques mois des élections présidentielles américaines.
Comme il l’avait fait pour David Fincher, James Vanderbilt s’attache à reconstituer minutieusement l’enquête journalistique réalisée par Mapes et qui sera dévoilée au public par le célèbre présentateur Dan Rather. L’équipe de production de CBS rassemble témoignages et documents et s’apprête à faire exploser ce qui pourrait faire l’effet d’une bombe. Mais l’histoire va diverger de l’enquête classique quand on va découvrir qu’une partie des documents présentés sont des faux grossiers et que dans la précipitation personne n’a vraiment pensé à vérifier qu’ils étaient authentiques.
La première partie du long-métrage fait irrémédiablement penser à Spotlight, qui n’est sorti qu’il y a quelques mois et qui est encore présent dans les esprits suite à son Oscar du meilleur film. La comparaison se tient d’autant plus que la mise en scène de Vanderbilt est aussi sobre que celle de Tom McCarthy, à ceci près que Mandy Walker à la photo fait du meilleur travail que son collègue d’en face, Masanobu Takayanagi. Coté acteurs, Cate Blanchett fait évidemment du très bon boulot comme en faisait Michael Keaton. On ne s’attardera pas sur Robert Redford, toujours aussi impeccable.
La différence vient alors du sujet évoqué. Spotlight évoquait un scandale sans précédent et qui retenait de fait notre attention. Le cas de Truth est plus compliqué puisqu’il évoque un sujet bien plus léger vu de ce coté de l’Atlantique -et même si on peut comprendre le scandale américain. Difficile de se sentir impliqué quand il s’agit d’évoquer la non-carrière militaire d’un ancien président américain. Qui plus est, et même si Vanderbilt cherche à maintenir un rythme, la seconde partie du film s’intéresse au travail journalistique lui-même et à la manière dont l’enquête a été faite. On se sent alors encore moins impliqué par la carrière de journalistes qui nous sont presque inconnus dans cette partie du globe et ce, malgré tous les efforts fournis par le casting en place.
Autant il est toujours intéressant de plonger dans la reconstitution d’enquêtes minutieuses, autant il est important de trouver des sujets qui méritent d’être évoqués avec du recul et en prenant en compte le temps qui passe. Qui sait, peut-être que dans quelques années, on verra un nouveau James Vanderbilt s’intéresser à l’affaire des « Panama Papers » ? Son film, en tout cas, ne mérite qu’un coup d’oeil distrait lorsqu’il atterrira en blu-ray.
Critique initialement publiée sur CloneWeb.net