Comment un jeune homme végétarien, adventiste, et sous serment de non-violence peut-il contribuer à l’effort patriotique dans l’effroyable conflit américano-japonais de 1945 durant la lente, atroce et laborieuse prise des iles pacifiques ? Ostracisme, violence, traduction en justice pleuvront d’abord, de la part de ses camarades, hiérarchie militaire et cour martiale, démontrant néanmoins une étonnante civilité comparativement au sort réservé aux objecteurs de conscience par exemple en France. Parvenu pourtant à servir d’infirmier de terrain à l’intérieur même du règne du napalm, du sang, de la mort, des bombes, et de la sauvagerie inouïe des champs de bataille, il brilla et en fut onze fois décoré.
Ce film à la fois éblouissant et abominable relate l’histoire vraie de Desmond Doss, l’un des artisans de la « victoire » d’Okinawa, où son acharnement à la fois spirituel et décérébré par les hurlements et les staccatos lui permit de sauver des dizaines de compagnons laissés pour morts sur place et d’inspirer le courage du reste des troupes. Le déchainement insupportablement authentique de cette atroce boucherie nous est servie avec la désormais maestria d’un Mel Gibson dont la signature, après La passion du Christ et Apocalypto, semble consister à fusionner dans l’excellence violence, douleur, foi et héroïsme humain.
Après 99 homes, Andrew Garfield confirme manifestement son entrée dans la cour des grands, bien loin des bondissants Amazing Spider-Man ; Hugo Weaving, à des années-lumière des Matrix, est bouleversant en vétéran démoli de la Grande Guerre ; et Sam Worthington, totalement à mille lieues également des Titans agités, peaufine ce touchant témoignage.