Il règne sur le premier long métrage de Bouli Lanners, une grisaille de tous les instants. Oppressante bien que sublime et enchanteresse. Elle est partout, dans le ciel, dans les maisons abandonnées, les enfances perdues, les rêves oubliés, les visages tristes.
Les prémices du cinéma de Lanners sont déjà là. La caméra est subtile, intelligente. La recherche d’une originalité, une identité propre, caractérise aussitôt le réalisateur. Parfois, il en fait trop, s’attarde à outrance. L’excès de bonne volonté nuit à la beauté d’ensemble et le mieux est l’ennemi du bien. Mais il touche souvent la grâce et nous offre de splendides plans d’ensemble et quelques très beaux travellings en contre-plongée.
Ultranova, c’est aussi une volonté de réalisme, le désir de vivre avec ces quelques personnages, d’oublier la caméra pour une immersion dans le bête quotidien de gens terriblement humains. Ce douloureux réalisme, à peine romancé, est pesant – mais rend ces quidams diablement attachant – et prive le film d’une part d’imaginaire qui se serait montrée salvatrice pour le spectateur.
Ultranova, c’est une sensibilité à fleur de peau, c’est la consécration de l’amour d’un belge pour l’être humain. Malgré tous ses défauts, ses faiblesses, ses peurs. Rien n’est dissimulé ici mais tout est pardonné par une constante pudeur qui fait du premier rire concédé une véritable délivrance. Il y a de la beauté dans cette douceur, cette mélancolie, l’émotion est palpable, magnifiée par de belles interprétations et des plans serrés toujours bienvenus sur les visages d’acteurs décidément inspirés.
Achevé comme il avait commencé, Ultranova laisse un désagréable sentiment de vide, l’impression d’avoir rencontré un réalisateur à l’immense talent mais d’une timidité maladive, comme son personnage principal. Bouli Lanners déborde d’idées novatrices mais il lui manque encore cette capacité de synthèse qui fera de ses productions futures de merveilleuses réussites.
-IgoR-
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le 18 mai 2014

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-IgoR-

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