Trois types qui braquent une banque, j'ai décidément un intérêt inlassable pour les scénarios anorexiques. Il n'y a qu'eux qui soient assez limpides pour l'expression d'une mise en scène sans nulle autre pareille orchestrée par le génie improbable qui s'attarderait sur le rejeton famélique d'une rubrique de faits divers.

La forme, la putain de forme. C'est elle qui fait toute la moelle d'un film pareil. Elle est si bien composée, menée au millimètre qu'elle absorbe le fond pour le régurgiter dans son tourment explosif et implacablement simple. Il n'y a presque rien bordel. Une pièce, une poignée de tronches incarcérées dans ce clapier suffocant et une foule de rapaces déments dehors. Des éclats de voix, des pleurs, des sonneries de téléphones, le chuintement d'un talkie-walkie, un rire, les arabesques d'un perlage de sueur... Tout devient mer d'huile se laissant irrégulièrement perturber par un léviathan capricieux.

Je reste définitivement bluffé par ces types qui font tout un film avec quatre murs et un trombinoscope de gueules paumées, démunies ou désincarnées, drôles et terrifiantes. Les vagues bleutées des types armés, le public déchaîné, scandant encouragements, joie ou hargne au rythme des marées, troupeaux de hyènes embrumées à l’affût d'une quelconque pitance, suivant le régime de chacun, gloire, célébrité, argent, héroïsme, sang... Mais toutes les charognes ont finalement plus ou moins le même goût et tous finissent à la même table, se chapardant les restes à la moindre occasion, le plus beau jour d'un opportuniste faisant le plus insipide d'un autre.

Et Al est royal. Plus que jamais. Il est incroyablement humain, perdu au milieu des vents, tous muscles tendus sur la barre du gouvernail. Dirigé par le roi du huis-clos, c'est un plaisir incomparable de le trouver ici descendant un peu de son piédestal d'icone vénérée et de le voir à fleur de peau, laissant tomber le marbre pour une maladresse touchante et tellement vraie, saisissante de justesse. Le type accumule les détails fabuleux comme un maître, sans même sembler s'en rendre compte. Il a l'air d'un pantin inapproprié quand il déballe un fusil semblant bien trop grand pour lui ou quand il prend deux minutes à réussir à mettre le feu à un bout de papier. Un côté perdu, ailleurs, à côté, au dessus, en dessous peu importe, mais authentique.

Clairement un des meilleurs films que j'ai pu voir depuis un bail, un de ces films qui est ce que j'aime le plus, une accumulation de petites pépites de bravoure sur un os bien maigre. Brillant.
zombiraptor
9
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films et La scène finale se passe de nuit, sur un aéroport, avec des gros avions qui font du bruit.

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le 11 janv. 2015

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zombiraptor

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