Harry Palmer, la crème de l'espion, le gratin du finnois.
Enthousiasmé par le premier Harry Palmer (Icpress, danger immédiat), j'avais enchainé par le deuxième opus de la série (Mes funérailles à Berlin) avec encore plus de bonheur.
Si je n'avais pas, à l'occasion de ce 2eme film, écrit de critique, c'est que Pruneau, en deux ou trois phrases définitives dont il a le secret, avait résumé tout le bien que je pensais de la suite de aventures de l'espion briton flegmatique.
Les réserves, cependant, semblaient de mise pour le troisième volet de la série, mise en scène par l'ineffable Ken Russell.
Et pourtant.
Voici donc les aventures de Palmer en Finlande.
On retrouve avec plaisir les personnages périphériques du héros (Colonel Stock, Colonel Ross) qui respectent haut la main le cahier des charges. Nous sommes dans une suite qui respecte les codes des deux premiers chapitres.
Comme toujours, les rapports avec le grand frère du MI6 (un certain Bond) sont étroits: le thème, l'époque, Saltzman à la production (associé à un certain André de Toth... la classe, non ?), Maurice Binder au générique (qui confère à la parodie Bondienne, d'ailleurs).
Le caractère de Palmer reste fidèle à ce qu'on aime de lui (aura-t-il son augmentation de 300 livres à l'année ?). On découvre même que le bonhomme aime Humphrey Bogart et est assez bordélique. La scène introductive est de ce point de vue assez hilarante. Avec les bonnes références administratives, on peut entrer chez Harry et piller son intimité sans qu'il n'y trouve à redire.
Harry Palmer est Michael Caine, Michael Caine est Harry Palmer. On peut presque se réjouir que la série n'ait pas eu plus de succès pour que notre âme de cinéphile cryptique puisse se repaitre du bonheur de ces trois films (avant de découvrir les deux séquelles improbables issus des 90s...) jubilant dans l'anonymat de son plaisir d'initié.
La réalisation de Ken Russell constituait, il faut bien le dire, la grande interrogation du film. Comment le fantasque anglais allait-il se couler dans le moule ? C'est le point qui constitue, à mon sens, la principale et très agréable surprise. On alterne les plans plastiquement très réussis (l'arrivée des cavaliers dans la neige, Palmer parmi les cadavres, Anya en ombre chinoise dans la serre...) et les cadrages étonnants mais non gratuits: a base de gros plans qui, en s'élargissant révèlent une autre perspective, les idées de Russell, typique de l'époque tout de même, enrichissent une trame un poil ronronnante.
Bon, parce que l'histoire est tout sauf impérissable. Même si l'idée que le méchant soit incarné par un Texan chrétien fanatique anti-rouge est assez bonnarde, rien dans le déroulé du scénar n'est réellement de nature à nous secouer (cela dit, Helsinski en 67, c'est bath).
Restent les curiosités: Donald Sutherland en figurant scientifique, et une espionne russe qui m'a fait étonnement et terriblement penser à Catherine Deneuve pendant tout le métrage (ce qui expliquait pour moi une forme de répulsion instinctive), jusqu'à ce que je réalise qu'il s'agissait de sa sœur. Ah ha... merde, je suis con.
Au final, un gratin finnois aux petits oignons.