L'ale ou la cuisse

Henry Fonda est un jeune puceau fils de milliardaire qui, après avoir soigné ses velléités herpétologistes en Amazonie, tombe pendant la croisière du retour dans les anneaux étroits d'une belle aventurière qui lui fourrerait bien ses crochets quelque part...

Barbara Stanwyck joue la femme-serpent qui fait tourner bourrique le pauvre Henry qui n'en peut mais. Membre d'un charmant trio de tricheurs de cartes, avec un Charles Coburn impérial en paternel sans vergogne, la belle s'offrira aussi le rôle particulièrement sadique de l'aristocrate anglaise briseuse de coeurs, la Lady Eve du titre.

Le père du puceau est joué par Eugene Pallette, magnifique en magnat de la bière... pardon, de l'ale... Sifflotant, chantonnant et hurlant comme personne. Dommage que le fils semble plus attiré par les jolies jambes de la tentatrice que par la noble profession du pater familias.

Preston Sturges choisit à dessein deux acteurs peu habitués aux comédies : Fonda, qui sort à peine des Raisins de la colère, est parfait en naïf de première catégorie, et c'est peu de dire que Stanwyck s'amuse ici comme une petite folle... Nos deux tourtereaux, parfaitement accompagnés de seconds rôles truculents à souhait, permettent de passer au-delà des petits défauts habituels chez Sturges : un scénario approximatif, un rythme inégal, et le petit n'importe quoi de laisser-aller qui fait aussi son charme...

Le résultat est à la fois charmant et quelque peu insignifiant, léger dans tous les sens du terme. Le reste dépend de l'humeur et de la bonne volonté du spectateur.

Par exemple, détail marquant d'un film qui ne le fut pas assez : j'avais déjà vu ce film il y a une dizaine d'années, j'en avais tout oublié, si ce n'est quelques bribes que la séance vient juste de réveiller.

N'empêche, c'est rien chouette comme film, ça se croque à belles dents, avec la queue et les noyaux.