Victime d'une polémique aussi incongrue que gratuite, Un Français ne mérite pas vraiment sa comparaison précipitée à American History X, plus en retenue, moins nihiliste. Diastème nous invite au cœur de la haine de l'autre, le poison de son absurdité, et d'une douloureuse prise de conscience initiatique. Dans un processus d'abord perturbant, le réalisateur multiplie les plans-séquences et les ellipses drastiques, sans repères temporels ne serait-ce qu'un visage transformé, des posters, une émission télé... De la modestie dans cette difficulté ressort la nature palpable du film, loin de la didactique "extrême droite démoniaque" ou de toute portée politique. Diastème invoque le temps et le mouvement pour des propos simples, les entrechoque parfois bien habilement (la Marseillaise d'un meeting FN confrontée à celle d'une victoire au football), même s'il n'évite malheureusement pas quelques grosses ficelles bien lourdes. Au sein d'un casting pas tout le temps crédible, on retiendra la performance surprenante d'Alban Lenoir, aussi intense dans la rage que sa retenue, qui parvient à tenir sur ses épaules les déséquilibres du film. Aussi audacieux que casse-gueule, Un Français est avant tout un drame humain, hôte d'un espoir sans fulgurances, tantôt effrayant tantôt touchant, souvent maladroit, mais dont la proposition de cinéma est définitivement louable.
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