Nous allons commencer de suite par écarter un débat sur ce film : "Un français" n'est pas le "American History X" français. D'abord parce que le néonazisme américain n'est pas le même que le néonazisme français : ils n'ont pas les mêmes racines, pas les mêmes façons d'aborder les autres cultures (ou de les rejeter), pas les mêmes façons de s'exprimer ... Ensuite parce que "American History X" est le récit d'un homme qui explique à son petit frère pourquoi il ne doit pas l'imiter et en quoi son "engagement politique" dans de tels extrêmes a été une erreur alors que "Un français" se contente de retracer le parcours d'un homme qui ne rejette nullement ce qu'il a fait et dont la majeure partie du film se passe dans les années 1990, au plus fort de son engagement. Enfin parce que "American History X" est mon film favori et que, même si j'ai apprécié "Un français", ce film ne lui arrive pas à la cheville.
"Un français" a suscité de grands débats en France : censuré par ses avant-première annulées, critiqué par des gens qui ne l'avait pas vu puisqu'il n'était pas encore sorti, etc ...
Sa vertu aura été de s'inscrire à un moment donné dans un débat de société que l'on n'osait pas forcément aborder frontalement alors forcément cela a froissé quelques sensibilités : la montée de l'extrême-droite et la dédiabolisation d'un parti politique qui souhaite faire oublier ses racines violentes.
Diastème n'a pas choisi le sujet le plus consensuel et le plus facile à traiter mais c'est sa force. On prend une petite claque devant ce film. Mais une petite hein !
Prendre Alban Lenoir pour le rôle principal a été une bonne idée : il a de l'énergie à revendre lorsqu'il le faut mais il sait aussi se poser et faire passer quelques émotions. Il rentre ainsi bien dans son personnage sanguin mais réfléchi et a donc su incarner les deux facettes de Marco.
"Un français" est documenté. Beaucoup de scènes sont inspirés d'événements qui se sont réellement déroulés même s'ils peuvent parfois sembler poussés.
Cependant, je trouve l'approche de Diastème un peu trop distancée. On ne le sens pas suffisamment impliqué dans le message qu'il cherche à faire passer d'où le fait que le film perde en force.
Diastème ne propose effectivement aucune analyse sociologique et ne porte aucun jugement sur son personnage. Où est donc la valeur ajoutée du film ? Comme je le disais juste au dessus, le film perd en force avec une telle distance prise par l'auteur.
Le principal inconvénient de ce film est justement le fait qu'il conte une histoire intéressante et propose un sujet pas forcément très traité (voire pas du tout) dans le cinéma français mais, pourtant, le spectateur n'est pas plongé dans cette histoire. On a du mal à s'y immerger.
Cela est probablement dû aux réminiscences de cinéma d'art et d'essai qui émergent parfois au milieu du film. Ce choix de traitement est, à mon sens, une erreur puisqu'il perd une partie du public.
Il a souvent été fait une critique à ce film par les professionnels : celui d'user de trop d'élipses. Selon eux, ce choix va perdre des spectateurs et fragilise l'ensemble. Je serais peut-être plus nuancé qu'eux sur les effets que peut avoir ce choix mais ils ont sûrement raison quant à l'inopportunité de telles élipses.
Dommage, on aurait pu avoir un "American History X" français. Ce n'est pas le cas. Cependant, le film reste intéressant à regarder pour ce côté justement documenté et pour au moins le fait qu'il aborde un tel sujet frontalement.