Un homme idéal par cloneweb
Pour écrire cette chronique, j'aurai sûrement pu aller recopier un papier d'un camarade et faire croire que je l'avais signé. Vous n'y auriez vu que du feu et peut-être même m'auriez-vous félicité pour ma prose ? Mieux, le succès de cette chronique écrite par un confrère pourrait me valoir de bousculer ma vie, de faire craquer la jeune fille brune qui ne fait que hanter mes pensées. Mais non, je ne suis pas l'Homme Idéal que décrit Yann Gozlan. Et je n'ai pas les traits de Pierre Niney.
Ces quelques lignes résument l'idée de base du nouveau film de Gozlan. Presque cinq ans, cinq longues années après le très bon Captifs, celui qui avait mis en cage Eric Savin et Zoé Felix revient sur le devant de la scène avec un thriller porté par le tout jeune césarisé Pierre Niney dans lequel il est question de vol de manuscrit. Ecrivain en galère, Mathieu découvre le journal d'un ancien de la guerre d'Algérie. Brut, réaliste et surtout très bien écrit, le recueil raconte le quotidien d'un soldat français de l'autre coté de la Méditerranée. Le jeune écrivain décide, sachant que l'auteur original est mort et sans famille, de publier le bouquin en son nom, ce qui lui permet de rencontrer le succès et de charmer la très très jolie Alice (Ana Girardot, toujours aussi impeccable). Mais le temps passe et son éditeur lui réclame un autre bouquin. Que Mathieu ne peut bien entendu pas écrire. Il va alors s'enfoncer dans le mensonge.
Le pitch de départ aurait aussi pu être pompé sur d'autres. Il rappelle vaguement Fenêtre Secrète (avec Johnny Depp) ou encore The Words, film encore inédit en France avec Bradley Cooper. Mais Yann Gozlan choisit de raconter autre chose que cette usurpation, ce qui l'intéresse d'avantage c'est de voir un homme s'enfoncer lentement mais sûrement dans le mensonge. Ce qu'il fait d'ailleurs en maitrisant parfaitement sa narration puisqu'il va faire monter petit à petit la tension pour le personnage de Niney. On pourrait penser qu'il allait vite se retrouver face à un proche de l'auteur original du manuscrit, ce que montre la bande-annonce, mais le réalisateur également scénariste choisit de se focaliser en premier sur le syndrome de la page blanche et sur toutes les excuses que Mathieu doit trouver pour ne pas perdre la face face à sa belle-famille. C'est seulement bien poussé à bout qu'il se retrouvera face au "méchant" de l'histoire.
Il en résulte un vrai film haletant, totalement prenant, porté par un Pierre Niney qui mérite largement sa statuette. Cette nouvelle génération d'acteurs totalement impliqués et qui cherchent enfin à faire autre chose que du théâtre filmé (auquel sont accoutumés les seconds rôles du film d'ailleurs) fait plaisir à voir, surtout quand ils sont bien dirigés. Gozlan fait du bon travail, en laissant parler sa caméra, en faisant passer des choses par l'image sans avoir besoin d'une ligne de dialogue pour insister lourdement. On appréciera notamment qu'il joue avec certains clichés et codes du genre en les faisant passer pour des rêves ou des hallucinations.
A une époque où le cinéma français continue à enchainer les drames familiaux tournés le temps d'un weekend à la campagne ou les comédies qui ne font plus rire que ceux qui les produisent, cet Homme Idéal arrive comme une bouffée d'air frais. ....... Et contrairement à son pitch, c'est un vrai sujet original.