Au commencement du printemps, lors du Norouz, fête traditionnelle des iraniens célébrant le nouvel an du calendrier persan, le poisson rouge acquiert une place importante dans la préparation du rituel : symbole de la vie, il est alors placé sur la table, dans un bol d’eau, dressée et décorée pour l’occasion. Faut-il y voir une allusion (image du renouveau d’une Iran plus libre et plus juste ?), un parallèle avec Reza, qui se consacre à leur élevage, pris soudain dans la nasse (une compagnie privée tente de le déposséder de son exploitation et de son terrain) et se débattant pour survivre ? Reza, cet homme intègre qui, toujours, a refusé pots-de-vin et arrangements dans le cheminement de son existence tels un modèle de probité, une figure du Bien, unique et comme dissonante dans une République rongée par la corruption et les compromissions.


À la manière d’un Andreï Zviaguintsev (et jusque dans la mise en scène, sèche et elliptique) qui, dans Leviathan, dénonçait lui aussi le pourrissement moral de son pays en mettant à mal la volonté d’un homme luttant pour la sauvegarde de sa maison, Mohammad Rasoulof (condamné par les autorités iraniennes dans son travail d’artiste indépendant) place Reza au cœur d’un récit déconstruisant, très minutieusement, ses inébranlables convictions. Entre honneur et entêtement, dignité et colère, Reza (Reza Akhlaghirad, aride) tente comme il peut de résister non seulement aux diverses attaques menées contre lui et sa famille, mais surtout à la tentation de céder, trop facilement, à l’abolition de ses idéaux.


L’accumulation de tracas administratifs et d’intimidations en tout genre alourdit un peu trop la charge par son envie de dire absolument les hypocrisies d’une société où tout se camoufle, s’achète et se deale (de la sphère privée à l’école en passant par les banques, les assurances, les voisins, le médecin, la police…). Rasoulof en revanche pose un regard actuel et direct sur une Iran, son Iran, régie par la sujétion physique, morale et religieuse, de ses citoyens. Dans ce pays, il y a les oppresseurs et les oppressés, déclare lors d’une scène l’un des personnages du film. Un homme intègre, froid et implacable, montre in fine qu’entre les deux, il y a aussi les pions, les rouages, ceux que l’on contrôle et dont on se sert.


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mymp
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le 24 déc. 2017

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