« Un jeune chaman » est un nouveau film sur l’évolution de la Mongolie vers la modernité similaire dans son propos à « Si je pouvais simplement hiberner ». Il décrit, en effet, les conséquences de la fin de la société rurale mongole et du développement concomitant de la vie citadine en s’intéressant surtout aux aspects psychiques et comportementaux. On retrouve les thèmes abordés par « Si je pouvais simplement hiberner » mis en perspective de la même façon via la vie quotidienne de jeunes gens ballotés par l’évolution fulgurante de leur pays. L’originalité de cette nouvelle œuvre vient du fait que le « héros », sortant de l’adolescence, tient le rôle de chaman pour la communauté du quartier de banlieue d’Ulan Bator ou il réside. On devient le spectateur du partage de son existence entre tradition et émancipation d’un point de vue personnel, intime. Et ce partage manifestement ne va pas de soi, ne se déroule pas sans aspérités ce qui nous apparait humainement logique étant donné l’écart existentiel que cela suppose. De fait, le final du film suggère la quasi impossibilité d’accommoder vie traditionnelle en harmonie avec les « esprits de la nature » et vie citadine basée sur la consommation, le divertissement artificiel et la compétition. Le jeu de l’acteur principal, primé à Venise, contribue beaucoup à l’ambiance de cette œuvre guère optimiste sur les effets de la modernité. Notre jeune chaman semble traverser cette période se son existence comme un voyage initiatique à revers qui lui confirme que la « vraie vie » n’est pas dans cette surenchère d’artificialités. Et l'on se trouve à souhaiter connaître qu'elle pourrait être sa vie dans les 10-20 ans à venir... Que sera-t-il devenu ?...
Les paysages grandioses, une nouvelle fois sous la neige (l’hiver a décidemment une forte empreinte sur l’imaginaire mongol !), contrastent avec la vie bruyante et anonyme de la cité (Il y a des vues saisissantes sur la capitale à l’urbanisme impersonnel et sans âme qui génèrent une angoisse quasi immédiate…). « Un jeune chaman » est une belle œuvre, nuancée et sensible qui sans être optimisme ne sombre pas non plus dans un nihilisme à l’occidental.