Le Taïwanais Ang Lee fut tout de même chargé avant d’en arriver là. Garçon d’Honneur, Sucré Salé, Raison et Sentiments, Tigre et Dragon, Le Secret de Brokeback Mountain et l’Odyssée de Pi sont les plus connus du grand public. Son expérience touche essentiellement le drame, proche d’un ton familial. L’auteur Ben Fountain a su capter les frontières psychologique d’une nation, ayant tendance à vulgariser et banaliser les actes héroïques de jeunes soldats. L’œuvre se concentre ainsi dans l’optique de démontrer la détresse réelle chez les rapatriés.
Ce que l’intrigue exploite alors, c’est l’impact médiatique qui confronte clairement « Deux Amériques ». D’un côté, les soldats fraichement sortis du feu de l’action et de l’autre, un collectif que l’on ne peut pas toujours qualifier de peuple. Billy Lynn est ainsi au centre de toute attention car la figure de héros qu’il représente est dépeint sur toutes les coutures possibles. Bien que l’on ait souvent abordé le thème post-Guerres Mondiales, du Vietnam et quelques-uns d’Irak, le message est plus fort ici où la population, l’arrière est dans la zone de feux du réalisateur. Le recul est nécessaire devant ce que beaucoup ignore ou ne comprennent pas immédiatement. Il n’y aura pas de meilleure propagande ou bien l’effet inverse que ce film qui ne manque pas d’audace.
Ce sont donc de jeunes « recrues » que le casting a préféré adopter. Il propose des visages vierges, innocents et inconnus. On les confronte rapidement à la dure réalité marketing dont ils font l’objet. La pop culture est présente pour appuyer le malaise qu’ils fréquentent. Leur prestation en spectacle de mi-temps de football montre bien que les sentiments sont refoulés en Billy et ses camarades instables psychologiquement. Sur ce point, pas de quoi s’inquiéter, les détails ne nous laissent pas le choix quant au camp à soutenir, à savoir le groupe de soldats.
C’est d’ailleurs par le biais d’un montage alterné entre flashback et réalité. Ce qui amène à pense qu’ils n’ont peut-être pas quitté leur guerre, mais qu’une autre les attendait au bercail. Les images réalistes s’affirment sur le terrain où la précipitation se confond avec la rapidité d’exécution. Il faut également noter la prouesse technologique, avec un rendu de 120 images par seconde, 4K ainsi que 3D. Malheureusement, il ne nous est pas donné à tous de pouvoir en profiter pleinement et certains passages s’avèrent flous… Sans doute, est-ce mieux ainsi, mais la fluidité aurait probablement rendu un meilleur hommage aux interventions musclées. Mais au-delà de ce léger défaut, Lee met en avant un cadrage déstabilisant. La dimension d’héroïsme cherche alors un sens, ce que recherche pleinement Billy Lynn à travers toutes les personnes qu’ils croisent, tans bien dans sa famille que dans le stade où il fait escale.
« Un Jour dans la Vie de Billy Lynn » propose alors son lot d’émotions et de rationalité face à l’adversité et la culture Américaine. Il ne faut pas toujours des mots pour décrire ce que l’on ressent et le réalisateur l’a compris. Il veut recrée la scène de toute pièce, où le spectateur derrière son écran ne gratte que la surface des choses. Tout est masqué par un artifice qu’il tend à démonter afin de nous sensibiliser davantage sur ce qu’il se passe sur le terrain, plutôt que sur l’image conventionnelle que la société manipule.