Il y a son abordable surface qui fait, en première lecture, d'Un Métier Sérieux un film facile, bienveillant et sincère, au sujet universel, au casting chorale instantanément sympathique (Cluzet et Exarchopoulos en tête) et à l'agréable sentiment de vérité.
Mais il y a en profondeur l'incapacité pour Thomas Lilti d'assouvir son impossible désir d'exhaustivité.
Le film se résume donc à un chapelet de saynettes jamais creusées, jamais abouties, toute traitées avec distance puis laissant silencieusement la place à la suivante (d'une histoire d'amour tue entre deux professeurs à une autre qui commence, en passant par un ridicule accident de surf, tout aussitôt oublié).
La galerie de personnages, certes touchants et très justement interprétés, n'est qu'une incarnation de types, de caractères, digne de la moins bonne des sociologies.
Ces pions utiles ne sont justifiés par le scénario que pour incarner une thématique particulière de ce court catalogue sans saveur (le vieux prof, pilier du collège, mais qui s'ennuie poliment, le nouveau, le prof cool, la prof coincée... tous ayant des problématiques parentales propres).
Frileux, Lilti, désormais autorevendiqué cinéaste officiel des métiers français, ne s'encombre même pas d'un seul propos un temps soit peu revendicateur, éloignant son film de toute réalité politique, conceptualisant son collège comme un espace indéfini, flou et désincarné, et imaginant une mixité sociale idyllique jamais réfléchie.
Le film a évidemment son lot de moments de tension, d'humour ou d'émotions, mais tout ceci est si mécanique, si inconsistant, et beaucoup trop facile pour être le témoin et porte-parole fidèle d'une bien sérieuse profession, dont les enjeux dépassent toujours et bien largement la simple anecdote.