Il faut reconnaitre à de nombreux auteurs des années 70 d’avoir parfaitement su saisir les mœurs de leur époque. Nombreuses sont ainsi les peintures sociales (qu’elles soient placées sous le signe de la comédie ou du drame) à avoir rendu avec justesse l’impact de mai 68 dans les relations entre les hommes et les femmes et entre les différentes générations. Le sujet choisi par Claude Berri est osé mais colle parfaitement à cette époque où toutes les barrières ont presque été levées, laissant la porte ouverte à des situations évitables. Agnès Soral qui se trimballe seins nus devant l’ami de son père est typique d’une époque qui sera révolue dès la décennie suivante où la société va s’échiner à remettre chacun à sa place et à ne pas mélanger certaines choses.
Cette fausse comédie de plage, qui n’oublie jamais d’être drôle et tendre, est, avant tout, un drame qui prend ses deux protagonistes en otage. L’attirance réciproque conduit la première à un chagrin d’amour sincère et le second à un sentiment de culpabilité qui sera, finalement, balayé par de sincères sentiments. Tout est amené avec une immense finesse et le propos ne paraît jamais artificiel et, de fait, moralisateur. Le film, par ailleurs, ne juge pas, il explique plutôt la complexité de certaines situations et tente de comprendre certains personnages. Dans le rôle du quadra amoureux de la fille de son ami, Jean-Pierre Marielle, comme à son habitude, est prodigieux. Attachant, vulnérable, pleutre, il endosse avec subtilité un rôle qui n’a rien de celui du beauf libidineux qu'il a pu souvent interpréter. Face à lui, Victor Lanoux, lui aussi plus malin que dans certains autres rôles qu’il pouvait tenir à cette époque, incarne un père blessé avec cette sensibilité à fleur de peau qui semble toujours ronger sa carcasse d’ours mal léché.
Le résultat est peut-être un des meilleurs films de Claude Berri même si, étrangement, il tend à être moins visible que de nombreuses autres de ses réalisations. Si la mise en scène reste rudimentaire, Claude Berri confirme qu’il est un excellent conteur. La qualité de l’interprétation fait le reste dans cette comédie de mœurs amère et remarquablement maîtrisée. Son remake, qui mettra au goût du jour des thématiques ayant évolué en quarante ans, s’il sera honnête, ne parviendra pas à se mettre au niveau de ce très bon film.