La violence des démunis
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le 10 déc. 2016
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La puissance du cinéma de Rodrigo Plá tient moins aux sujets qu'il traite qu'à l'excellence de sa mise en scène. Après La zona et La demora, Un monstre à mille têtes confirme le talent d'un cinéaste exigeant et moderne.
Le récit est sec et ramassé et le film très court. À partir du moment où Sonia Bonet part à la recherche du médecin instructeur de la compagnie d'assurance qui a refusé un nouveau traitement à son mari malade, tout va très vite. La narration aux différentes temporalités accentue un double sentiment d'urgence et de fatalité, chaque nouveau personnage arrivant en avance puis se glissant dans le récit comme il entrerait sur une scène de théâtre. Les voix-off combinent et articulent les différentes séquences alors que le son parfois se distord.
Le cadre multiplie les verticales et casse la linéarité de l'image. Travaillant les points de vue, jouant avec les vitres et les reflets qu'elles créent, surexploitant les flous, allant et venant sans cesse entre l'intérieur et l'extérieur, magnifiant les contrastes, la caméra de Rodrigo Plá imprime à son récit une ambiance singulière qui sort le film de son sujet. On n'est pas là dans la dénonciation frontale d'un système capitaliste injuste, on est dans une course absurde, une comédie humaine glaçante, une quête sans issue.
L'empathie pour le personnage de Sonia est total, de même que pour son fils. Les personnages a priori négatifs sont montrés de manière très humaine et leur réaction, qui tient autant à l'instinct de survie qu'à une sorte d'altruisme retrouvé, confirme la volonté du cinéaste d'éviter tout manichéisme.
Rodrigo Plá regarde le monde et nous le restitue dans toute son incongruité. Comme ses films précédents, Un monstre à mille têtes brille par une exigence formelle profondément habitée et l'on s'étonne encore que son travail soit encore si confidentiel.
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Créée
le 4 avr. 2016
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