Les humains mentent. Ils sont fourbes, vicieux, sadiques, sans même le savoir.
Ils sont là, bienheureux dans leurs égos sur-gonflés, tristes à en mourir, traversant la vie comme des pains perdus sans jamais toucher du doigt le coeur d'un autre être humain plus de quelques secondes par peur de se mouiller.
Les gens sont tordus de milles et une manières. Et pourtant ils sont beaux dans leurs vulnérabilités.
J'ai fais ce travail une décennie. J'ai nettoyer les culs, essuyer les baves, appeler mes handicapés "Les copains", "Les kotoreps", "Les affreux". J'ai assumer leurs folies dans les magasins, les ai défendu et protégés - d'eux même souvent. J'ai mis les mots sur leurs galères et ils ont mis du sens dans ma vie.
J'ai éclaté la limite de la "distance professionnelle" sans jamais me retourner. J'ai ri à en pleurer, souvent à leur dépens et ils se sont moqués de moi en retour dès que j'me cognait le petit orteil dans un meuble. Je les ai pris dans mes bras quand ils étaient mal et ils m'ont pris dans les leurs quand ça été mon tour. J'ai allégé leurs esprits quand ils étaient anxieux et ils m'ont redonné de la perspective quand je me prenais la tête. Je leur est montré mon vrai visage et ils me l'ont retourné.
Comment décrire ce sentiment ineffable, ce mélange d'absurde, d'impatience, de joie profonde, d'affection, de complétude que l'on rencontre qu'au contact des personnes qui ont des handicaps mentaux ?
Comment expliquer la pureté et l'innocence d'un humain sans masque, avec un gros coeur en bandoulière qu'il vous jetterait à la figure ? Ça laisse des cicatrices, des tâches indélébiles. C'est la pillule rouge dans Matrix
.
C'est du boulot aussi. C'est l'impression de réaliser un tour de force constant avec le rire au lèvre et la joie au cœur. Et cette étincelle dans les yeux, ce truc dans le plexus solaire qui irradie.
C'est ce que ce film a fait.
Un pied de nez géant aux grosses productions.
Un grand respect à Artus qui ne me fait pas beaucoup rire dans ses sketchs mais qui a montré un sens artistique profond de la comédie dans ce film. Accompagné par les précieux clovis Cornillac qui assure et la sublime Alice Belaïdi.
Mais c'est surtout ces onzes personnes avec définitivement un petit truc en plus qui crèvent l'écran par leur justesse, leur honnêteté sans concession, leur amour de jouer, de se montrer, de faire la scène et d'être eux même au plus fidèle car ils n'ont d'autre façon d'être.
Comme disait l'éducateur Gaberan, l'esprit perce précisement là à défaut de se montrer ailleurs.
Merci d'avoir montrer ça à tout le monde.
Et n'oubliez pas : qu'est ce qu'on dit au chauffeur de bus ?