Je m’excuse d’avance mais la critique est longue et foutraque mais j’étais vraiment trop agacé par trop de choses il fallait que ça sorte.


Tout d’abord je dois admettre que la première partie est vraiment parfaite en tout point. On tient enfin un biopic musical qui joue habilement entre une histoire romancée et des passages musicaux dont l’introduction n’est jamais forcée. On est même souvent surpris sur certaines scènes lorsqu’une musique célèbre est jouée mais rapidement coupée ne nous laissant pas forcément le temps d’en profiter mais évitant ainsi le film musical catalogue. On a de plus une réalisation très soignée et plaisante, un vrai travail sur la profondeur de champ et sur le format horizontal. Petite mention à Chalamet aussi, il faut lui reconnaître une belle performance tout comme le reste du casting est aussi très bon même si la direction d’acteur les dessert.


Malheureusement dans la seconde heure, tout s’effondre et on enchaîne alors la check-list des biopics musicaux dont Mangold nous avait déjà habitué avec Walk the Line : l’ascension, la célébrité, la tournée, la copine délaissée et trompée, les addictions, l’agent obnubilé par sa star. Le pire restera pour moi ce gimmick de réalisation qui concentre à peu près tout ce que je déteste : l’artiste est sur scène et performe une de ses chansons phare, le public réagit positivement et pour bien souligner que ce n’est pas un artiste comme les autres et qu’il vient révolutionner la musique, on colle un gros plan sur les visages de son entourage ébahi par sa performance. Et ces plans il y en a beaucoup beaucoup beaucoup. Le personnage de Pete Seeger interprété par Edward Norton tient cette fonction pendant 90% du film. Sauf à la fin, car cette fois-ci il est agacé par le virage rock de son protégé, du coup on le filme en gros plan les sourcils froncés. Encore pire : le personnage de sa femme Toshi. Durant absolument tout le film elle est filmée à très nombreuses reprises dans un de ces gros plan, on s’attend à ce qu’elle intervienne, dise quelque chose, mais au final non. C’est seulement lors du concert final, lorsque son mari s’apprête à prendre une hache pour couper la musique, qu’elle apparaît dans le cadre d’une manière absolument ridicule pour l’en empêcher. Difficile de se retenir de rire, c’est donc ça le climax de son personnage après 2h ?


Une autre scène du même type m’a pas mal agacé c’est juste avant la précédente lorsque Dylan chante en duo avec Joan Baez sur la scène d’un festival et que l’ex copine qui a peut-être l’idée d’envisager à nouveau une relation avec lui observe depuis les coulisses. La scène ne montre au début que le duo sur scène qui semble plutôt complice, et à ce moment-là j’ai eu une vision absolument claire et précise sur chacun des plans qui allaient enchaîner, et je ne me suis pas trompé : la caméra tourne, on voit d’abord l’ex en coulisse qui observe, GROS PLAN sur sa tête, elle constate la complicité des deux chanteurs, les larmes qui coulent, elle fait demi tour en s’en va. Vraiment j’pourrais jurer avoir vu cette scène des centaines de fois.


Au final ça converge sur un des plus gros soucis du film qui est que absolument tous les personnages ne sont tournées que vers Bob Dylan. Il est filmé comme un dieu (lui-même le prétend dans le film). Forcément, on montre quelques uns de ses défauts mais on gomme ce qui ne serait pas correct pour un biopic grand public, il s’agirait de ne pas froisser LA légende. Les autres personnages n’existent pas en eux-mêmes et ne sont caractérisées que par leur relation avec l’artiste. En témoigne cette scène entre Seeger et Guthrie, alors que ce dernier vie probablement ses derniers instants et que son ami lui annonce partir en tournée, ce qui sera probablement leurs derniers moments ensemble. Et de quoi tu parles avec ton meilleur ami dans vos derniers moments ensemble ? Bah de Bob Dylan évidemment puisque tout ne tourne qu’autour de lui.


On retiendra évidemment de très belles scènes musicales mais dont la force ne provient que de la musique de Bob Dylan lui-même et non pas du film lui-même, comme si il ne se reposait que sur son artiste et non pas sa mise en scène académique.


Tout le propos du film est qu’il faut parfois accepter le virage vers la modernité, casser les codes pour évoluer artistiquement, d’autant plus à une période incroyablement prolifique musicalement. Mais Mangold lui refuse catégoriquement ça, il aurait pu casser les codes du biopics musical et se tourner vers quelque chose de plus rock’n’roll de la même manière que Dylan dans sa carrière mais décide de faire tout l’inverse, il nous serre ce qu’on a déjà vu des milliers de fois avec les mêmes clichés. On pense forcément à Inside Llewyn Davis qui reste définitivement un bien meilleur film sur la folk ou bien à Leto qui avait su parfaitement s’approprier le style musical qu’il filmait, on est malheureusement pas prêts de retrouver le même éclat de génie.

Encom
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le 3 févr. 2025

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Aurélien A

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