14 Juillet 1789, un bébé se meurt, non loin de la Bastille. Dans la liesse générale , la mort est bien présents comme le recto d'une pièce commune, partagée avec la vie. La révolution française a un prix. Certes étonnement faible à la vue du film de Pierre Schoeller. En effet, très rares sont les morts ici et il devient alors risible, presque, d'entendre Adèle Haennel parler à la police de 400 000 citoyens morts pour la liberté, comme une déléguée syndicale aujourd'hui annoncerait des chiffres colossaux d'une manifestation à 12 personnes.
Le film semble ambitionner d'être une fresque de la période fondatrice de la France moderne. Il finit cependant par se tromper de cible et de point de vue. Le principal problème du film, c'est sa mise en scène, son histoire étant finalement difficilement en cause, et donc l'histoire de chacun de ses personnages. La liberté du peuple a été gagné par celui-ci, mais était-il nécessaire de lui accorder la place principale de ce film, je veux dire, était-il astucieux, y avait-il un intérêt à tant montrer ce peuple ? N'aurait-il pas été plus intéressant de construire le film comme un huis-clos dans l'assemblée ? Avec tant de personnalités importantes de l'histoire.
Le casting est à côté du sujet. Mis à part un Maret très juste et parfaitement révolutionnaire et un Saint-Just à la mesure du perchoir, tous les autres ont l'air bien flottants et hors de propos. A noter également, la performance magistralement faible et fade d'un Louis Garrel livide qui désincarne Robespierre. On retiendra également la prestation de Gaspard Ulliel, placé la comme on vous colle un nouveau-né devant les yeux, on trouve tous ça très mignon deux minutes, un peu moins pendant deux heures. Ulliel a l'air porté à l'écran par les bras du réalisateur et fixé dans le cadre comme un décor de plus. Plus invisible et inexpressif que dans Juste la fin du monde de Xavier Dolan.
La photographie et la mise en scène constituent le second problème du film. Rien ne bouge. Le cadre est statique et pour le moins regrettable pour l'une des périodes les plus chaotiques de l'histoire de France. De plus, la lumière paraît inappropriée. Les seuls instants où le film prend des couleurs, c'est dans les scènes d'extérieurs où souvent, la lumière naturelle dicte sa loi, et les couleurs ne sont pas véritablement modulables. Versailles n'est pas d'or et ne transparaît jamais de majesté royale, ce qui est finalement une prouesse pour un palais qui, aujourd'hui encore écrase tous ses visiteurs par sa superbe. Tout dans le film est terne, des tenues (excepté à la Fashion Week Nationale : l'Assemblée), aux visages, souvent trop peu éclairés (on ne parlera pas de la scène pour le moins étrange d'Adèle Haenel sur le rebords de la fenêtre, cachant ce sein que l'on ne saurait voir).
L'essentiel du film aurait pu, aurait du, ne se dérouler qu'à l'Assemblée. Il aurait ainsi pu créer de vraies relations de rivalités ou de fraternités entre les députés, royalistes, révolutionnaires, etc..Mais sa volonté de laisser "l'image au peuple" le dessert. Les décisions fondatgrices du pays n'ont-elles pas finalement été prises dans l'Assemblée, et non dans les rues ?
Mention spéciale finalement à Laurent Laffite dont la "participation" n'a même pas le mérite d'exister tant elle n'apporte rien et tourne plus au ridicule le personnage du Roi.
Le film est malheureusement un échec dans lequel tout ou presque sera oublié. Ses ambitions et sa mise en scène étant mal placées, le film n'accomplit rien et n'offre que deux heures de vide, entrecoupées de scènes presque propres à l'Assemblée.
La révolution française au cinéma est encore attendue, et pour un film avec un budget aussi conséquent, lé résultat n'est pas à la hauteur. Néanmoins, voir des projets de cette ampleur fait du bien au cinéma français et si le succès n'est pas au rendez-vous, il ne faut pas abandonner ces ambitions.
La révolution est en suspens.