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Quel contrôle peut-on prétendre exercer sur le flux continu de pop culture qui se déverse sur nous jour après jour. Symbole d’évangile ou suppôt de Satan, quelle confiance peut-on accorder à ses pop stars qu’on ne connait qu’à travers le prisme d’une relation fantasmée ? Entre paranoïa et révélation, les messages cachés dans nos œuvres préférées sont-ils le fruit d’une dimension artistique supérieure ou les graines d’une vaste conspiration? Like a virgin est-elle vraiment une métaphore for big dicks ? La création des boys bands ne tient-elle qu’à une vaste manœuvre de la marine américaine ? Kubrick a-t-il filmé les premiers pas de l'homme sur la Lune ? Peut-on vraiment utiliser la carte de the legend of Zelda pour trouver son chemin à Los Angeles ? Quid des phallus cachés dans les œuvres Disney ? Complot ? Coïncidence ? Ou bien simple turlupinade indigne d’intérêt ? Et si ces stars fantasmées durant l’adolescence n’étaient en fait que pure fabrication d’une industrie mercantile où une élite tire les ficelles en secret. «Il n’y a pas de rébellion, juste quelqu’un qui gagne sa croûte. Ta culture, c’est l’ambition d’autres hommes », nous lâche le compositeur, personnage démiurgique qui viendra fracasser les idéaux d’au moins trois générations le temps d’une scène d’anthologie.


Mais au fond cela a-t-il de l’importance ? Cette relation passionnelle que l’on entretient avec la pop culture, mérite-t-elle une telle obsession. Nous peuple de Sens Critique, combattant sans relâche pour un monde plus éclairé, cultivant chaque jour un savoir dont il est impossible de trouver une réelle finalité, faisons-nous fausse route ? Ne serait-on pas plus heureux à se languir inlassablement au soleil, un playboy à la main, une cigarette thérapeutique à la bouche, dans la totale insouciance du monde qui nous entoure. Cette idée fixe de chercher du sens dans chaque œuvre est elle aussi vaine que la prétendue enquête servant de fil rouge à un polar halluciné ? Poser des questions rhétoriques n’est-il qu’une pauvre tactique de diversion pour faire croire à un semblant de réflexion ? Scoobidoo aurait-il résolu la terrible affaire du tueur de chiens ? Est-ce que le pape chie dans les bois ?


Adulescent à la démarche cotonneuse et aux ambitions vacantes, Andrew Garfield n’incarne pas un héros ni même un personnage foncièrement intéressant. Branleur notoire improvisé détective dans une affaire de disparition tirant au complot, sa quête de réponses n’est pas motivée par la justice ni même par amour d’une douce voisine à peine effleurée. Expression malavisée d’un passage à l’âge adulte difficile, thème déjà à l’honneur dans l’intriguant It Follows, il n’est question que de trouver une occupation assez ludique pour passer le temps et fuir les ennuyeuses responsabilités du monde réel. Tel un avatar de RPG, notre personnage (appelons le Sam) doit sauver la princesse mais passe son temps à faire la fête / frapper des gens / échapper à la faune locale/ se rendre à des points d’intérêts / parler à des PNJ insolites. Au détour de missions secondaires comme "suivre le coyote errant" ou "échapper à la femme chouette", Sam rejoint le Hub (comprendre son appartement) pour se reposer et remplir sa barre de santé à base de céréales. Comme souvent dans une quête ce n’est pas la destination mais le voyage qui importe, si bien qu'au moment de la résolution on ne souvient plus bien des raisons de notre périple, mais on sourit, heureux des souvenirs emmagasinés durant l'aventure.


Silver lake, quartier d’Hipster à la vie nocturne débridée, dans son lac se reflète les collines qui abritent ces grands noms du divertissement dont on aimerait parfois pénétrer l’intimité le temps d’une nuit. Est-il masturbatoire de louer l’esthétisme fantastique d’un trip halluciné parvenant à nous faire redécouvrir la ville la plus représentée du cinéma américain ? Peut-on savourer l’ambiance délirante du métrage sans avoir à citer l’influence d’un quelconque réalisateur célèbre ? Un homme au rêve mouillé contemplant un ange sortir de la piscine telle une madone, un autre bave aux lèvres déshabillant le film de la moindre référence qui s’esquisse à ses yeux, qui est coupable de voyeurisme ? Des références justement, David Robert Mitchell en a et les grands pontes d’Allociné se chargeront certainement de toutes les énumérer le temps d’un article/diaporama dont ils ont le secret. Plus intéressant, la manière dont ces références sont ingérées comme matière à réflexion, plutôt que balancées dans un simple exercice de style. Une comparaison avec Ready Player One serait ici pertinente bien qu’elle m’obligerait à devenir sarcastique. Probablement la différence entre un réalisateur qui aime et comprend la pop culture et un autre (plus vieux certes) dont l’Oasis n’est qu’un mirage construit à partir d’un savoir théorique dont il ignore la réelle teneur.


Bien qu’au fond, comment différencier le génie de l'imposture ? Peut-être faut-il être sous influence pour trouver du sens dans ce film et passer outre ses quelques excès de longueur. Peut-être n'y a-t-il aucun sens et somme-nous victime d'une escroquerie à grande échelle dont les médias seraient complices. Essai vaniteux d'un intellectuel trop porté sur la branlette ou portrait générationnel tentaculaire d'un réalisateur destiné à un avenir radieux, à qui donner raison ? Si on mesure l'intérêt d'une œuvre à sa capacité à diviser, Under the Silver Lake est un voyage à ne pas rater. Reste à savoir la quantité de drogues à ingérer pour que vous puissiez dignement l'apprécier.

LeMalin
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le 26 sept. 2018

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