A l’origine, il y a « Sous la peau », le livre de Michel Faber que je lis depuis quelques mois déjà, mais comme je ne lis que #1 dans les trains #2 dans les lavomatiques et que je ne fréquente assidument ni l’un ni l’autre (même si j’ai la carte 12/25, pas de méprise), je n’avance pas trop mais suffisamment pour constater la grande liberté d’adaptation du film. On passe d’une petite bigleuse aux gros seins à Scarlett à perruque (ou insolent brushing ?) et gros seins. Bon, finalement, si ce n’est qu’une histoire d’ophtalmie…

Under the skin, donc. Film-féculent qui se digère lentement. Après l’attente, considérable, il y a eu la vision de l’objet film, objet à haute teneur sensorielle, tout en lenteurs et en sensations perturbantes. Et l’après : la naissance d’une pointe de déception, presque morte née, point de départ d’une glorieuse appréhension, elle aussi tout en lenteurs, elle aussi perturbante.

Le bébé synopsis nous cause d’alien séductrice, et c’est quasi spoiler ce qui se(mble se) passe(r). On ne saura jamais vraiment le pourquoi du comment, ni le véritable comment d’ailleurs. Scarlett J, beauté marmoréenne : un corps, du lipstick et quelques phrases. Impassible, déshumanisée, la voilà à errer dans les Highlands en quête de chair à atomiser. (Réflexion perso : le seum qu’une extraterrestre gère mieux le code de la route que moi/fin de la réflexion perso) Puis un soir, elle rencontre Adam Pearson, génial et monstrueux Elephant Man de notre siècle. C’est le moment où le film bascule discrètement de l’autre côté, l’ébauche d’une réflexion sur l’humanité, et ce que c’est qu’être humain. Ou comment, en quelques phrases et en quelques gestes, la solitude immense de deux créatures se hasarde furtivement l’une dans l’autre, et c’est vraiment beau. C’est beau mais c’est difficile à expliquer, et peut-être, à véritablement assimiler sur le coup.

Alors on évoquera la soundtrack de Mica Levi, prodigieusement obsédante et anxiogène, ou la photographie du film – et ses fulgurances radicales. On évoquera la beauté déconcertante de cette créature venue d’on-ne-sait-où, en sous-location dans ce corps étranger qu’elle cherchera à concevoir, et à percevoir. On évoquera l’audace de l’objet, son refus de tout formalisme, ses répétitions, son rythme intransigeant, on applaudira la réalisation quasi-documentaire (les caméras cachées les gars) qui le rendent encore plus inquiétant. Et oui on y voit Scarlett en full frontal (mais de là à en faire toutes ces news, ça bascule un peu dans le gros malaise), oui on y voit un vrai mec qui a la neurofibromatose (comme Elephant Man donc, et lui aussi aussi en full frontal ho-ho).

C’est une autre sorte de science-fiction à laquelle on assiste. Une quête d’humanisation – et d’Humanité - complètement silencieuse, inflexible et détachée. Le genre de film – rare – qui s’infiltre sous la peau et y propage sa fureur calmement, comme un virus. Tu sais Scarlett, être une femme, c’est pas si facile.
oswaldwittower
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le 26 juin 2014

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oswaldwittower

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