Séance rehaussée de la présence de Stéphane Brizé
L'histoire d' "une vie" se situe au tout début du XIX siècle et évoque la vie de Jeanne, jeune aristocrate, qui, dès sa sortie du couvent, épouse presque aussitôt, sur les conseils avisés de ses chers parents, Julien, un jeune homme dont les codes ne coincideront pas avec ceux du prince charmant ! Une vie de malheur commence...
Le film est juste sublime.. J'avais lu dans mon adolescence ce roman de Maupassant, mon auteur préféré à cette époque, parce que j'aimais sa façon efficace et sobre de conter les histoires et je me demandais, comment celle-ci, assez simple en somme, et riche en descriptions, pourrait être rendue au cinéma...
Le résultat est magistral et montre une fois de plus la puissance de l'image, des ellipses et surtout le génie dans le montage des scènes. Je l'ai senti en regardant le film et ensuite, encore mieux avec l'éclairage du réalisateur, qui nous a honoré de sa présence.
Le film est construit sur un dédale de séquences non chronologiques, mais tellement bien agencées qu'elles n'altèrent ni la fluidité du film, ni la compréhension de l'histoire, tout au contraire. Les contrastes entre certaines scènes, sont puissants et évocateurs: la scène de tempête avec la mer déchaînée à laquelle succède brutalement une scène de printemps éclatante...La scène de fin que je n'évoquerai pas ici, avec la scène très sombre qui la précède ! Paf, çà explose, c'est évident !
Ce soir, Stéphane Brizé m'a livré (comme à tous les autres, bien entendu ;) ) la clé de compréhension de presque tout son cinéma , mais pour moi, ce fut lumineux: il filme la fin des illusions, thème qui l'obsède de façon récurrente (on le retrouve aussi dans la loi du marché) et qui est parfaitement rendu dans cette œuvre !
L'autre élément essentiel qu'il nous a dévoilé, c'est qu'il utilise la technique du documentaire, il recherche la sensation de vérité absolue du personnage, il faut que l'acteur devienne le personnage.
L'actrice Judith Chemla a été capable de satisfaire cette exigence au delà de ses espérances, une révélation : elle est extraordinaire de naturel et de finesse.
Stéphane Brizé raconte qu'il lui a fait lire le scénario et lui a dit : "maintenant tu l'oublies, je veux faire un documentaire sur toi, je veux te filmer toi et ton rapport au monde !"... Et il filme longtemps, sans trop se montrer comme si la scène se passait dans la vraie vie : Réussite totale !
Il a utilisé la même technique dans "la loi du marché", avec Vincent Lindon...
Petite anecdote typique, il raconte que Vincent Lindon ne savait pas comment se terminait la dernière scène de la loi du marché, celle où il plaque tout... il ne lui a dit qu'au dernier moment :"Maintenant tu sors"... effet réussi!
Ceci dit, Maupassant et Brizé sont bien synchrones sur le dénouement du film, qui se résume par cette vérité première :
"La vie, voyez-vous, ça n'est jamais si bon ni si mauvais qu'on croit " vérité à laquelle j'adhère complètement !!!